Cas de conscience

« Génocide », « Dénazification »…. Un monde qui sombre sous les mots

Qui écrit l'histoire sur fond de réseaux sociaux ?

Suite à notre précédent article : Une autre analyse de l’interview Poutine/Tucker Carlson, Il m’a semblé important de revoir de plus près ce qui caractérise la dénazification et plus particulièrement, le génocide.

Le président russe accuse Kiev d’être « nazifiée » et responsable d’un « génocide ».

Nous sommes en 2022, plus d’une semaine de guerre, et toujours la même rhétorique. Dans une allocution télévisée, jeudi 3 mars, Vladimir Poutine a remercié les soldats russes pour leur « précieux combat contre des néonazis ». Depuis le début de l’invasion de la Russie en Ukraine, le président russe ne cesse de répéter que l’objectif de Moscou est de « dénazifier l’Etat ukrainien » et de « protéger les personnes victimes de génocide de la part de Kiev ».


Dans le camp adverse, le président ukrainie, Volodymyr Zelensky, a utilisé le même registre en comparant l’invasion russe aux agissements de « l’Allemagne nazie ». En témoigne cette caricature d’Hitler tapotant la joue de Poutine, tweetée par le compte officiel de l’Ukraine.

 

Ces allégations sans preuves se fondent sur les inquiétudes soulevées depuis 2014 au sujet de liens entre des groupes d’extrême droite ukrainiens et des néonazis.

« Elles font référence au bataillon Pravi Sector, qui s’est battu dans le Donbass et qui a été réintégré à l’armée régulière ukrainienne. Certains de ses membres avaient une idéologie nazie, mais ils ont été écartés par le président Zelensky », explique Carole Grimaud-Potter, professeure de géopolitique russe à l’université de Montpellier.

À noter que ce genre de bataillon existe aussi côté russe. C’est notamment le cas du groupe paramilitaire Wagner, dont le fondateur, Dmitri Outkine, arbore fièrement un tatouage SS dans le cou.

Autre accusation grave formulée par Vladimir Poutine : un « génocide » perpétré par l’Ukraine contre les russophones dans le Donbass depuis huit ans.


Une allégation « ridicule » pour le chancelier allemand Olaf Scholz, cité par la RTBF. « Il n’y a pas une once de vérité dans ces accusations », a martelé le ministère américain des Affaires étrangères.

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, Vladimir Poutine ne cesse de justifier sa guerre par la volonté de « dénazifier l’Ukraine et le régime de Kiev ». En réalité, ni l’Ukraine ni son gouvernement ne sont dominés par l’idéologie nazie.

Ce récit dressé par le Kremlin est très loin de la réalité puisque le régime politique actuel de Kiev n’a rien à voir avec l’idéologie nazie. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a été élu démocratiquement avec 73% des voix en 2019, loin devant le parti d’extrême droite, Svoboda, et ses 1,6%. Depuis dix ans, l’extrême droite ukrainienne recule dans les urnes. Elle est passée de 10% en 2012, à 6% en 2014, puis à 1,6% en 2019.

Pour dénoncer l’hypocrisie de ce narratif russe, Volodymyr Zelensky insiste sur ses origines juives, lui qui a perdu des grands-parents durant l’Holocauste.

Israël et la Russie devant le crime de génocide

La Cour internationale de justice vient de se déclarer compétente pour juger si les actions de la Russie en Ukraine constituent ou non un génocide. La Cour devra donc décider simultanément de deux génocides potentiels: celui dont la Russie est accusée en Ukraine et celui dont Israël est accusé à Gaza.

Cette mise en parallèle des actions des deux pays n’a rien de bon pour l’un ou pour l’autre.

La comparaison entre la Russie et Israël ne peut que discréditer la Russie auprès des populations du monde arabe, si le gouvernement de Vladimir Poutine est jugé coupable. Inversement, le gouvernement israélien de Benyamin Nétanyahou, déjà furieux de faire l’objet dune enquête pour génocide par la Cour internationale, risque d’être déconsidéré dans l’opinion publique des pays démocratiques, en premier lieu aux États-Unis. Ceci pourrait d’entraîner une dure perte d’influence pour le gouvernement israélien.

1) Quels sont les deux principaux éléments de la définition de génocide?

La définition de l’ONU d’un génocide comporte un aspect matériel d’atteinte à la pérennité d’une population spécifique, mais aussi une intention manifeste de porter atteinte à cette pérennité. Les deux aspects doivent être présents pour qu’il y ait génocide.

2) Quels sont les faits reprochés à la Russie?

La Russie a conquis presque le cinquième du territoire ukrainien. Poutine a exprimé l’intention de conquérir l’Ukraine au complet. Il nie l’existence même de l’Ukraine et de la culture ukrainienne.

L’armée russe aurait en particulier visé les installations culturelles de l’Ukraine.

L’enseignement de l’Ukrainien est interdit dans les territoires ukrainiens qu’elle occupe. Cependant, Poutine ne cherche pas à anéantir toute la population ukrainienne ou à lui faire quitter complètement le territoire de l’Ukraine. Il veut la russifier.

Même si certaines villes sont devenues inhabitables à la suite des bombardements russes, tel n’est pas le cas de l’ensemble des territoires ukrainiens conquis par les Russes.

De nombreux réfugiés ukrainiens ont été accueillis dans le monde entier. En israël 30 000 ukrainiens ont trouvé refuge, en plus des 100 000 Ukrainiens de confession juive qui ont fuit les combats, et ont été accueillis dans le cadre de la Loi du retour.

3) Quels sont les faits reprochés à Israël?

Les destructions de l’armée israélienne à Gaza sont d’une grande ampleur. Presque la moitié de tous les bâtiments de Gaza sont détruits ou inutilisables. Il faut dire que le territoire est minuscule avec un tissus urbain extrêmement dense.

Les Gazaouis souffrent de malnutrition et une bonne partie d’entre eux est au bord de la famine. Presque toute la population de Gaza est déplacée. Personne n’a voulu accueillir de réfugiés, et surtout pas les pays arabes alentour. Pour le monde alentour, accueillir des réfugiés gazaouis serait faire le jeu d’Israël qui est soupçonné de vouloir vider le territoire des Palestiniens.

La Cour de justice internationale, qui n’a pas accédé à la demande de l’Afrique du Sud sur l’arrêt immédiat des combats a, par contre, demandé au gouvernement israélien de ne pas entraver l’aide humanitaire à Gaza et de ne rien faire pour chasser les Gazaouis de leurs territoires…

4) Les souffrances des populations sont-elles justifiées?

Quelle que soit la décision de la Cour internationale de justice, la guerre en Ukraine ainsi que la guerre contre à Gaza, sont de plus en plus liées dans l’opinion publique mondiale. Au point que le massacre du 7 octobre subi par les Israéliens victimes d’une horde de barbares Gazaouis entrés sur leur territoire est souvent nié sur les réseaux sociaux.

Si la Cour internationale de Justice s’est contentée d’ordonner à Israël de prévenir tout acte de «génocide», les camps israélien et pro-palestinien ont chacun interprété le contenu de la décision en servant leur narratif.

Les opérations menées par l’armée israélienne dans la bande de Gaza depuis près de quatre mois, en réponse à l’attaque du Hamas le 7 octobre, doivent-elles être qualifiées de «génocide» ?

C’est la pomme de la discorde qui occupe en grande partie les joutes verbales entre soutiens de la Palestine et défenseurs d’Israël. Et la question à laquelle certains ont cru, à tort, que la Cour internationale de Justice (CIJ) allait apporter une réponse, ne peut être tranchée par le poids des mots.

5) Pourquoi un conflit est-il oublié ?

La guerre du Haut-Karabakh, prolonge une guerre d’extermination entamée il y a plus d’un siècle. L’extermination du peuple arménien.

Après avoir lancé une offensive militaire, l’Azerbaïdjan contrôle  totalement le territoire de l’enclave arménienne de la République du Haut-Karabakh. En guise de justification, le régime azerbaïdjanais parle d’une « opération antiterroriste », quand l’Arménie évoque un « nettoyage ethnique ».

La quasi-totalité de la population arménienne a fui ce territoire indépendantiste, enclavé en Azerbaïdjan. Plusieurs observateurs dénoncent un « génocide » et une « épuration ethnique ». Les juristes ne sont toutefois pas unanimes sur cette qualification.

Pourquoi ?

6) L’épuration ethnique, une notion sans réalité juridique

« On peut utiliser mille mots, mais il est évident qu’il s’agit d’une épuration ethnique »a estimé sur franceinfo Hasmik Tolmajian, ambassadrice d’Arménie en France. 

« Le Haut-Karabakh vient d’être en quelques jours vidé de l’intégralité de ses habitants (…) Si ça, ce n’est pas une épuration ethnique, je ne sais pas ce que c’est », a également dénoncé sur RTL la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.

« C’est la définition d’une épuration ethnique : effacer la présence des Arméniens dans ce territoire. Et c’est ce qui se passe aujourd’hui », a affirmé Anahita Akopian, présidente du Comité de défense de la cause arménienne.

En droit international, cependant, le terme de « nettoyage ethnique » n’est pas reconnu comme un crime et n’a pas de définition précise, rappelle l’ONU.

L’expression est apparue dans les années 1990, lors du conflit en ex-Yougoslavie, et provient probablement d’une traduction littérale du serbo-croate « etničko čišćenje », précisent les Nations unies. Les actes qui pourraient être qualifiés comme tels ne sont ainsi pas définis précisément.

En 1994, une commission d’experts des Nations unies sur l’ex-Yougoslavie a toutefois statué dans un rapport* que le « nettoyage ethnique » était « une politique délibérée conçue par un groupe ethnique ou religieux visant à faire disparaître, par le recours à la violence et à la terreur, des populations civiles appartenant à une communauté ethnique ou religieuse distincte de certaines zones géographiques ».

Le terme n’est pas utilisé par les juristes pour faire reconnaître des actes devant la justice.

« La purification ethnique est un terme générique qui vient du langage courant », observe pour franceinfo Yann Jurovics, maître de conférence en droit international à l’université Paris-Saclay, ancien juriste pour les tribunaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda. Sa consœur Marjorie Beulay, maîtresse de conférences en droit public à l’université de Picardie-Jules Verne, confirme cette analyse.

Mais, même sans transcription juridique, cette expression décrit une réalité. « Le nettoyage ethnique passe par l’invisibilisation d’un groupe », relève-t-elle.

Dans le cas des Arméniens du Haut-Karabakh, l’invisibilisation prend par exemple la forme d’une destruction du patrimoine arménien, comme les cimetières, les monuments commémoratifs, rappelle The Guardian

« La situation laisse craindre que ceux qui restent [au Haut-Karabakh] puissent être forcés à être assimilés, ce qui fait partie du nettoyage ethnique. Poussé à son extrême, ce dernier peut conduire à un génocide », poursuit Marjorie Beulay.

7) Génocide un mot et des faits…

Le mot « génocide » est apparu à la fin de la Seconde Guerre mondiale et a rapidement fait son entrée dans le vocabulaire du droit international, suite à la Shoah.

Le crime de génocide a été créé en 1948 et défini dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de l’ONU.

L’article II de ce traité dispose qu’un génocide est caractérisé lorsque des actes sont commis « dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Parmi ces actes figurent : le meurtre, le transfert forcé d’enfants ou la soumission à des conditions de vie menant à la disparition partielle, voire totale, d’une population.

8) La particularité qui engendre l’oubli

La particularité actuelle du Haut-Karabakh est le fait que « les frontières sont ouvertes ». On n’empêche pas le départ, c’est la césure entre une politique de destruction biologique et une politique de persécution.

Cette particularité des « frontière ouvertes », n’est pas donnée au Gazaouis, puisque l’Égypte n’en veux surtout pas sur son territoire.

Pas question pour Le Caire d’accepter une migration massive de Gazaouis vers la péninsule hautement sensible du Sinaï.

Cette position exprimée par le pouvoir égyptien, fait l’unanimité dans l’opinion publique, y compris dans les cercles les plus critiques du pouvoir autoritaire du régime militaire. L’Égypte ne veut pas d’une nouvelle présence palestinienne permanente sur son sol, surtout si cette poche de réfugiés “est sous influence du Hamas, émanation des Frères musulmans égyptiens” et “bête noire du régime » du président Abdel Fattah al-Sissi. Ce dernier a d’ailleurs appelé les habitants de Gaza à se montrer “inébranlables” et “rester sur leur terre”.

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a de son coté mis en garde contre un déplacement massif de Palestiniens. M. Abbas “rejette totalement le déplacement” de Palestiniens de la bande de Gaza, “car cela équivaudrait à une deuxième Nakba pour notre peuple”, a-t-il dit dans un communiqué.

Par contre, l’Algérie se dit prête à accueillir les chefs militaires du Hamas, Yahya Sinwar et Mohammed Deif, organisateurs directs des massacres du 7 octobre.

Cette hypothèse est le produit des cogitations entre Abdulaziz Al-Sager, un conseiller officieux de Mohamed Ben Salman, le prince héritier saoudien, et Anne Grillo, directrice de la division Moyen-Orient Afrique du Nord (MENA) au Quai d’Orsay.

Nous voyons ainsi que la priorité semble plutôt se concentrer sur l’accueil des criminels, plutôt que sur celle de la population en danger.

Que devons-nous comprendre ?


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