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La philosophie de la cruauté sociale comme doctrine évolutionniste

Le Darwinisme social et l'égoïsme individuel

« L’égoïste est celui qui n’emploie pas toutes les minutes de sa vie à assurer le bonheur de tous les autres égoïstes. » Lucien Guitry.

Herbert Spencer, né le 27 avril 1820 à Derby et mort le 8 décembre 1903 à Brighton, était un philosophe et sociologue anglais. Issu d’une famille de radicaux, il fut très tôt intéressé par les questions politiques. C’est pourquoi il s’affilia à de nombreuses associations. Il devint ainsi membre de l’Anti-Corn Law League, fondée par Richard Cobden. S’il se fit connaître comme sociologue, il exerça cependant la profession d’ingénieur des chemins de fer.

Collaborant à The Economist, il rédigea de nombreux ouvrages originaux, dont les Social Statics (1850), fort inspirés par l’utilitarisme de Jeremy Bentham, A Theory of Population (1852), où il contestait le catastrophisme de Thomas Malthus, ou encore ses Principes of Psychology (1855). Sa grande œuvre consista en l’élaboration des Principes of Sociology (1876 à 1897).

Le darwinisme social, ou spencérisme, ou évolutionnisme social, est une doctrine politique évolutionniste apparue au XIXe siècle qui postule que la lutte pour la vie entre les hommes est l’état naturel des relations sociales.


Selon cette idéologie, ces conflits sont aussi la source fondamentale du progrès et de l’amélioration de l’être humain. Son action politique préconise de supprimer les institutions et comportements qui font obstacle à l’expression de la lutte pour l’existence et à la sélection naturelle.

Envisagé à l’échelle de la compétition entre les individus, il préconise la levée des mesures de protection sociale, l’abolition des lois sur les pauvres ou l’abandon des conduites charitables.

Le sociologue Herbert Spencer, un des idéologues, pense ainsi que « toute protection artificielle des faibles est un handicap pour le groupe social auquel ils appartiennent, dans la mesure où cette protection a pour effet […] de le mettre en position d’infériorité face aux groupes sociaux rivaux. » Dans sa version extrême, on aboutit à des thèses racistes ou eugénistes voire même au nazisme.

Sur le plan politique, le darwinisme social a servi à justifier scientifiquement plusieurs concepts politiques liés à la domination par une élite, d’une masse jugée moins apte.


Parmi ceux-ci, on trouve le colonialisme, l’eugénisme, le fascisme et surtout le nazisme. En effet, cette idéologie légitime l’élimination des races humaines et des êtres les plus faibles, au nom de la sélection naturelle et de la survie du plus apte, pour que ceux-ci laissent la place aux races et aux êtres les mieux armés pour survivre.

Le spencérisme est cependant une conception libérale qui aurait engendré le néolibéralisme au cours du XXe siècle. Ou comment élaborer de manière scientifique avec la philosophie d’Herbert Spencer la « théorie du salaud » comme principe sélectif et évolutionniste dans le champ de la sociologie et des applications politiques, économiques et sociales.

Herbert Spencer et l’évolutionnisme

« Je n’aime pas la bonté des autres : elle est une borne à mon égoïsme. » Henri de Régnier

L’évolutionnisme d’Herbert Spencer est une des doctrines qui, dans la période de 1860 à 1890, a eu la plus grande influence non seulement en Angleterre mais dans le monde entier ; conjugué avec le transformisme de Darwin, il a changé, sous plusieurs aspects, l’esprit de la philosophie.

Herbert Spencer préparé à la profession d’ingénieur, s’occupe d’abord, de 1842 à 1850, de sujets politiques et économiques ; ses premiers articles du Non conformist (The proper sphere of government, 1842) marquent un individualisme, une hostilité à l’intervention de l’Etat, qui resteront des traits permanents de sa doctrine. L’idée de l’évolution se fait jour dans les essais et les Principles of Psychology, qu’il publia de 1852 à 1857, par conséquent avant l’Origine des espèces, publié par Darwin en 1859.

Mais c’est en 1860 qu’il conçut le plan d’un Programme d’un système de philosophie synthétique, qu’il exécuta à la lettre et jusqu’au bout, sans rien changer de ses idées ni de son plan primitif, dans les First Principles (1862), Principles of Biology (1864-1867), Principles of Psychology (1870-1872), sans compter divers essais montre bien la physionomie morale de son œuvre : une assurance absolue sur les principes une fois découverts, qu’il maintient avec un dogmatisme tranchant sans jamais les confronter ni les comparer ; une curiosité critique, sans cesse éveillée, sur les améliorations de détail qui peuvent être apportées à la vie ; enfin un non-conformisme décidé qui suspecte instinctivement toute autorité ou coutume établie, qu’il s’agisse des cérémonies funéraires, des parades de la cour ou des titres académiques.

La formule de Spencer est d’ailleurs peut-être moins purement mécanique qu’il ne paraît d’abord ; si la première partie (intégration et dissipation de mouvement) s’applique mieux à la matière, la seconde partie (passage de l’homogène à l’hétérogène) se dit plus naturellement des faits supérieurs, biologiques, moraux ou sociaux comme la division du travail ; Spencer cherche, peut-être vainement, à unifier les deux parties.

La notion essentielle du transformisme darwinien, celle de la survivance du plus apte, qui commande l’évolution des espèces, est entièrement adoptée par Spencer qui en tire les conséquences les plus importantes non seulement en biologie, mais en psychologie, en morale et en politique.

La supériorité mentale et morale consiste dans la précision et la finesse de plus en plus parfaites des réactions d’un animal à son milieu. Le bien, si l’on veut laisser de côté toutes les divagations morales et religieuses, consiste dans l’ajustement aux conditions du milieu, dit autrement, de façon plus prosaïque, c’est « adapte-toi à la société ou disparaît » ou « marche ou crève » !

Cette définition comprend en elle, et explique celle des utilitaires, puisque le plaisir est un accompagnement de l’équilibre entre l’organisme et le milieu. Les lois mêmes de la nature dirigent donc spontanément l’être vers son bien. On peut concevoir une morale absolue dans laquelle le but serait atteint, et où l’homme, complètement évolué, n’aurait plus à choisir entre le bien et le mal. A cette morale absolue correspondrait un état social parfait selon Spencer, dont les sociétés animales, qui sont arrivées au bout de leur évolution, comme celle des fourmis, peuvent donner une idée.

Le naturalisme spencérien, si fortement rattaché à Darwin, se concilie-t-il avec sa thèse propre à l’évolution ? L’idée d’un milieu est tout à fait étrangère à ce développement interne de l’être que nous trace l’évolution. Il n’est rien moins que démontré que le progrès en hétérogénéité soit la variation qui adapte le mieux l’être à son milieu ; une complexité croissante le rend peut-être plus fragile et plus vulnérable et fait naître indéfiniment de nouveaux déséquilibres.

Le trait fondamental de Spencer, son individualisme, trouvait en revanche une égale satisfaction dans le darwinisme et l’évolutionnisme. Il a acquis par le premier cette foi en la nature qui lui fait considérer comme condamnable toute intervention humaine pour entraver les effets de la loi de survivance du plus apte, telle que la charité ou tout autre intervention de ce type qui fait échapper l’individu aux conséquences naturelles de ses actes.

C’est aussi « la main invisible » théorie socio-économique élaborée par Adam Smith selon laquelle l’ensemble des actions individuelles des acteurs économiques, guidées uniquement par l’intérêt personnel de chacun, contribuent à la richesse et au bien commun.

Mais cela peut-être également la « porte ouverte » à la compétition acharnée, tous contre tous, chacun pour soi, au capitalisme sauvage et au libéralisme économique le plus débridés.

L’égoïsme comme mode d’expression sociale

« L’égoïste est celui qui ne pense pas à moi. » Henri de Régnier (phrase dite par un égoïste).

L’égoïsme est un tempérament qui consiste à avoir tendance à privilégier son intérêt propre aux dépens de celui du reste du monde en général, ou d’autrui en particulier. Toutefois, ce terme peut revêtir une signification particulière en philosophie selon les auteurs ; certains s’en revendiquent ouvertement. Des doctrines annexes y sont fréquemment associées notamment le solipsisme, le nihilisme et l’individualiste anarchiste. L’égoïsme peut être une doctrine antilibérale opposée à l’humanisme. L’égoïsme est durement combattu par les libéraux, les philosophes des Lumières notamment.

L’égoïsme est traditionnellement considéré comme un défaut blâmable, à l’opposé de l’altruisme, et ce principalement sous l’influence des religions abrahamiques et de la morale judéo-chrétienne. Max Stirner et Friedrich Nietzsche font de l’égoïsme le contraire de l’idéalisme. Pour Stirner, il n’y a que des égoïstes conscients et inconscients. L’égoïsme inconscient ne conduit qu’à l’hypocrisie et à la souffrance, d’après Max Stirner. Pour Nietzsche, le ressentiment des nihilistes s’oppose à l’égoïsme des forts.

Il se distingue sémantiquement de l’égocentrisme qui est la tendance à ramener tout à soi-même, et à se sentir le centre du monde. L’égoïsme se rapproche parfois de l’individualisme lorsque ce dernier terme est entendu de façon populaire et péjorative, notamment par certains penseurs collectivistes ou nationalistes.

L’égoïsme et l’altruisme selon Schopenhauer

« L’égoïsme inspire une telle horreur que nous avons inventé la politesse pour le cacher, mais il perce à travers tous les voiles et se trahit en toute rencontre. » Arthur Schopenhauer, La Morale.

Arthur Schopenhauer (1788-1866) on pourrait résumer l’homme à une seule œuvre : Le Monde comme volonté et comme représentation. Il est aussi l’homme d’une seule idée : le monde tel qu’on se le représente dissimule une réalité plus profonde, une force impersonnelle qu’on peut appeler volonté et qui pousse sans raison tous les êtres à vivre.

Pour Schopenhauer nous considérons le caractère de l’homme bon, non pas par rapport aux autres, mais en lui-même, nous voyons alors qu’il prend une part directe au bien et au mal d’autrui ; que la raison en est dans le sentiment de la pitié ; qu’enfin c’est de là que naissent en lui ces deux vertus, la justice et la charité. Si nous revenons à considérer ce qui fait l’essence d’un tel caractère, nous le trouvons, à n’en pouvoir douter, en ceci : personne moins que lui ne fait une différence marquée entre soi-même et les autres.

Aux yeux du méchant, cette différence est assez grande pour que la souffrance d’autrui, par elle-même, lui devienne une jouissance ; et cette jouissance, il la recherche, dût-il ne trouver aucun avantage personnel à la chose, dût-il même en éprouver quelque dommage. Cette différence est encore assez grande aux yeux de l’égoïste, pour qu’il n’hésite pas, en vue d’un avantage même léger à conquérir, à se servir de la douleur des autres comme d’un moyen.

Pour l’un et l’autre donc, entre le moi, qui a pour limites celle de leur propre personne, et le non-moi, qui enveloppe le reste de l’univers, il y a un large abîme, une différence fortement marquée : « Pereat mundus, dum ego salvus sim » (Périsse l’univers, pourvu que je sois sauvé !) voilà leur maxime. Pour l’homme bon, au contraire, cette différence n’est point aussi grande ; même, quand il accomplit ses actes de générosité, elle semble supprimée : il poursuit le bien d’autrui à ses propres dépens : le moi d’un autre, il le traite à l’égal du sien même. Et enfin s’agit-il de sauver un grand nombre de ses semblables, il sacrifie totalement son propre moi ; l’individu donne sa vie pour le grand nombre.

Première partie : L’égoïsme – Michel Onfray  (ci-dessus)

Deuxième partie : Darwin : naissance de l’éthologie – Michel Onfray

 


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