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Ouroboros. La Tradition Secrète – 17 Les mystères de la Renaissance

Dans l’Ancienne Tradition Secrète, les odes de la Grèce antique, comme celles de Pindare et de Sapho, n’étaient pas seulement des expressions de l’amour romantique, de la folle douleur de la séparation, de l’extase que provoque l’apparition de l’être aimé, ou du regard illuminé de l’état amoureux, mais exprimaient aussi un désir exclusivement sexuel…

Elles révélaient aussi une autre vérité, bien plus historique et qui a toujours revêtu une importance considérable dans les annales des sociétés secrètes…

Dante

Dante Alighieri (1265 – 1321), ou Durante degli Alighieri fût le premier grand poète de langue italienne et son livre, « la Divine Comédie », est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de la littérature. Dans cette œuvre, il décrivit pour la première fois, ses propres sentiments amoureux…

Il se crut entièrement absorbé par les yeux de Béatrice et ajoute que l’érotisme qui s’en dégageait l’envoya directement au Paradis ! Il aurait rencontré Béatrice en 1274, mais cette dernière, de son vrai nom Bice di Folco Portinari, épousa un autre homme et mourut jeune en 1290…


Au XIIIe siècle, l’érotisme et le mysticisme s’entrelaçaient de manière tout à fait nouvelle en Occident et ce qu’on éprouvait lorsque l’on vivait une histoire d’amour, avec ses désirs mystiques et ce sentiment de prédestination, que cela devait arriver, provenait entièrement du ferment mystique de l’islam…

De même que l’on peut considérer que l’amour inconditionnel de son prochain, typiquement chrétien, est né du concept de « grâce » des prophètes hébreux, on peut dire que les mystiques soufis, tels qu’Ibn Arabî, ont, en atteignant des états de conscience altérés, éclairé la compréhension du sacré dans le monde.

Dans son ouvrage révolutionnaire « L’Interprète des désirs », Ibn Arabî exprimait l’amour sexuel en termes « d’amour divin ». Les soufis abordaient un sentiment qui n’avait pas encore été éprouvé et mettaient ainsi en place les conditions nécessaires afin que d’autres puissent en faire l’expérience.

La rencontre de Dante et de Béatrice fut donc considérée, et à bien des égards en Occident, comme celle du premier « coup de foudre » de l’histoire…


Pendant plus de mille ans, les instincts érotiques avaient été réprimés. Les énergies sexuelles avaient été canalisées afin de favoriser le développement de l’intellect humain. Mais à l’époque de Bacon et de Thomas d’Aquin, cette phase touchait à sa fin…

Encouragés désormais par un élan provenant d’Arabie, les gens commençaient à se délecter du monde matériel, à tirer un plaisir sensuel de la lumière, des couleurs, de l’espace et du toucher. Le point d’évolution de la conscience humaine sortit alors des cellules des moines pour se loger dans les jardins des délices.

Le monde commençait à se couvrir de sensualité…

L’occupation islamique de l’Europe s’attarda en Espagne. Puis, à mesure que la brillante civilisation mauresque s’étendait vers le nord, ce nouvel élan sensuel se propagea dans le reste du monde, à commencer par le sud de la France.

Au XIIe siècle, la Provence et le Languedoc devinrent les régions les plus civilisées d’Europe. Les troubadours, les poètes provençaux adaptèrent les formes poétiques arabo-andalouses : leurs éclats érotiques étaient source d’inspiration. Le premier troubadour qui apparut dans le courant de l’histoire exotérique fut Guillaume IX (1071-1126), comte de Poitiers et duc d’Aquitaine.

À son retour des Croisades, il se mit à composer de tendres et ardentes chansons d’amour. Mais, l’épanouissement de cette liberté nouvelle s’étendit bien au-delà de la cour pour atteindre toutes les strates de la société médiévale…

Les troubadours passaient non seulement outre les barrières sociales, mais permirent aussi d’inverser le traditionnel assujettissement des femmes aux hommes : dans leur poésie, les hommes devenaient les esclaves des femmes. Le mariage avait toujours fonctionné comme un élément de contrôle social, mais désormais les troubadours encourageaient une nouvelle forme d’amour qui ne serait plus arrangée mais spontanée, et qui pourrait exister entre des personnes qui n’étaient pas de même rang.

L’amour devint alors subversif, tout comme les sociétés secrètes…

Lorsque l’on accomplit l’acte sexuel, nous atteignons un état de conscience altéré qui nous confère des pouvoirs surnaturels. Tous les amants savent que, quand ils regardent vraiment au fond des yeux de l’autre, ils se touchent réellement.

Pour la première fois, les êtres humains faisaient « l’amour »…

En d’autres termes, l’expérience de tomber amoureux fut non seulement instillée dans le courant de la conscience humaine par les initiés, mais être amoureux avait acquis la structure profonde d’un processus d’initiation. Dans la poésie des troubadours, cette nouvelle façon de tomber amoureux ou cette nouvelle forme de conscience passionnée ne pouvait être atteinte que si l’on réussissait un certain nombre d’épreuves :

Passer par l’enfer et les eaux profondes, trouver la sortie du labyrinthe, combattre et tuer des bêtes sauvages, résoudre des énigmes ou encore choisir la bonne boîte ! La littérature des troubadours était donc truffée de symbolique initiatique. La rose, leur symbole le plus célèbre, provenait soufisme où elle représentait, entre autres choses, l’entrée du monde des esprits, ainsi qu’une allusion évidente aux chakras.

Mais une grave question se posa alors vite aux initiés : Quand nous arrivons à cet état de conscience altéré qu’est l’orgasme, sommes-nous capables de penser, ou bien l’orgasme est-il l’ennemi de la pensée?

Pour les sociétés secrètes et les groupes subversifs comme les Cathares, les Templiers et les Troubadours, qui enseignaient les techniques de l’extase mystique, cette question devint même vite fondamentale : La pensée humaine, si durement acquise au cours des millénaires, pouvait-elle survivre à l’extase mystique, ou états altérés de la conscience ?

Dans la Divine Comédie, Dante fit gravir à l’impulsion érotico-spirituelle des troubadours un échelon supplémentaire, car il y développait son amour pour Béatrice jusqu’à en remplir le cosmos tout entier.

Mais la Divine Comédie nous montre aussi que quand nous nous comportons mal dans cette vie, nous sommes déjà en train de préparer notre Purgatoire, notre enfer, et nous souffrons déjà, torturés par nos propres démons. Si nous n’aspirons pas à nous élever le long de la spirale des hiérarchies célestes, si nous nous contentons de réussites purement matérielles, alors nous sommes déjà en Enfer !

En réalité, l’œuvre majeure de Dante a été écrite pour être comprise à des niveaux différents : astrologique, cosmologique, moral et même, alchimique.

Comme le Livre des morts égyptien, La Divine Comédie est, à la fois, un guide pour l’au-delà, un manuel d’initiation et un récit racontant comment la vie dans le monde matériel, presque autant que dans l’au-delà, est façonnée par les étoiles et les planètes. Il nous enseigne que nous créons nous-même les monstres et les terribles punitions qu’ils nous affligent. Il nous dit que nous créons tous un enfer et un paradis intérieurs, mais il nous montre également comment notre inconduite affecte la structure et la matière mêmes du monde…

Enfin, il met le monde sens dessus dessous, pour dévoiler les effets abominables de nos pensées les plus profondes, et les méfaits que nous voulons dissimuler, tout ce que nous faisons ou pensons altère matériellement l’univers…

Dans l’Antiquité, on imaginait l’enfer avec sept niveaux ou sept murs, comme le labyrinthe de Minas qui était dessiné sur la monnaie crétoise. Mais on trouve aussi la même idée dans le récit d’Origène sur les Ophites (du grec ὄφιανοι > ὄφις,serpent), une secte gnostique du 1er siècle qui invoquait les sept démons montant la garde aux sept portails de l’enfer.

Cependant, ce qui a rarement été mentionné, c’est que le modèle qui inspira Dante dans La Divine Comédie était le récit du grand maître soufi Ibn Arabï relatant le voyage de Mahomet dans l’au-delà, le Futuhat.

En 1439, un mystérieux philosophe néo-platonicien pénétra à la cour de Côme de Médicis, qui dirigeait Florence…

Gémiste Pléthon

Gémiste Pléthon (1355 – 1452) possédait les textes perdus de Platon, ainsi que des textes néoplatoniciens, des hymnes orphiques et, plus étrangement, du matériel ésotérique censé dater du temps des pyramides égyptiennes. Il venait de Constantinople, où la tradition ésotérique néoplatonicienne prospérait toujours depuis les anciens Pères de l’Église comme Clément et Origène, tradition que Rome avait étouffée.

Pléthon réussit à intriguer Côme avec l’idée d’une lignée de tradition universelle et secrète, qui remontait au-delà des premiers chrétiens, à Platon, Orphée, Hermès et aux oracles chaldéens. Il souffla à Côme l’idée d’une philosophie éternelle de la réincarnation, faite de rencontres personnelles avec les dieux des hiérarchies, que l’on peut atteindre grâce à des cérémonies et les chants rituels des Hymnes d’Orphée.

Côme de Médicis demanda alors à l’un des philosophes les plus érudits de cette époque, Marsile Ficin (1433 – 1499), de traduire tous les documents de Pléthon, en commençant par Platon…

Sans le savoir, Pléthon venait de faire souffler sur Italie l’esprit de l’hermétisme, qui se répandit comme une traînée de poudre, parmi l’élite culturelle. Cet appel à l’expérience personnelle allait inspirer toute la Renaissance italienne.

La Renaissance fut un mouvement qui naquit à Florence grâce aux artistes qui pouvaient y exprimer librement leur art. Une Pré-Renaissance se produisit dans plusieurs villes d’Italie dès les XIIIe et XIVe siècles (Duecento et Trecento), se propagea au XVe siècle dans la plus grande partie de l’Italie.

Elle gagna aussi l’Espagne, dans certaines enclaves d’Europe du Nord et d’Allemagne, sous la forme de ce que l’on appela la première Renaissance (Quattrocento), puis gagna l’ensemble de l’Europe au XVIe siècle (Cinquecento)…

Giordano Bruno

Le grand philosophe et mage Giordano Bruno (1548 – 1600) a souvent raconté ce goût pour de nouvelles expériences, ainsi que cette nouvelle relation, toute vivante, avec le monde des esprits.

Sur la base des travaux de Nicolas Copernic et Nicolas de Cues, il développa la théorie de l’héliocentrisme et montra, de manière philosophique, la pertinence d’un univers infini, qui n’a pas de centre, peuplé d’une quantité innombrable de soleils et de mondes identiques au nôtre.

Accusé d’hérésie par l’Inquisition, notamment pour ses écrits jugés blasphématoires et son intérêt pour la magie, il fut condamné à être brûlé vif au terme de huit années de procès !

Dans ses écrits, il parle d’un amour qui fait :

« …transpirer excessivement, crier à en assourdir les étoiles, gémir jusqu’à ce que l’écho parvienne jusque dans les grottes de l’enfer, se torturer à en avoir l’esprit hébété, soupirer au point que les dieux défaillent de compassion et tout cela pour ces yeux, cette blancheur, ces lèvres, ces cheveux, cette réserve, ce doux sourire, cette ironie, ce soleil éclipsé, ce dégoût, cette blessure et cette distorsion de la nature, une ombre, un fantasme, un rêve… »

C’était tout nouveau dans la littérature et même révolutionnaire pour l’époque…

À la Renaissance, la littérature était illuminée par les étoiles et les planètes. Les grands écrivains invoquaient l’énergie de « l’esprit du monde » grâce à l’usage intelligent qu’ils faisaient de leur imagination débordante… La traduction des textes hermétiques de Marsile Ficin évoquait la création des images en termes ésotériques :

« Les Arabes disent que quand nous fabriquons bien et proprement les Images, si par l’imagination et l’effect nostre esprit est fort attentif à l’œuvre, il se conjoint aux Estoilles avecques l’esprit du monde, et avecques les rayons des Estoilles, par lesquels agit l’esprit du monde… »

Dans son langage, ça signifiait plus clairement que si nous imaginions le plus pleinement et de la manière la plus vivante qui soit, les esprits des planètes et les dieux stellaires, alors, grâce à cet effort de l’imagination, le pouvoir des esprits pouvait nous traverser.

Si le Moyen Âge fut l’âge d’or de la magie, la Renaissance fut celui de la pensée ésotérique.

Les penseurs ésotériques et les occultistes commencèrent à construire des images dans leurs esprits, que les dieux et les esprits pouvaient habiter et amener à la vie, comme autrefois, avec les statues des temples de l’Antiquité et de l’Egypte. En Italie, les artistes de la Renaissance qui avaient des croyances ésotériques se mirent à recréer les images magiques de leur esprit par la peinture et la sculpture…

Au Moyen Âge, la diffusion des grimoires s’était faite sous le manteau : c’était une activité marginale. Désormais, la littérature hermétique, largement publiée à la Renaissance, donnait des instructions sur la manière de confectionner des talismans servant à capter les influences du monde des esprits, influences que les artistes de l’époque reprenaient à leur compte.

La littérature hermétique expliquait comment il fallait procéder :

L’influence occulte était plus efficace si l’on utilisait, pour les talismans, les métaux correspondant aux esprits invoqués, comme par exemple : l’or pour le dieu du Soleil et l’argent pour la Lune.

On redécouvrait la compatibilité de certaines couleurs et formes, ou de hiéroglyphes et de sceaux, avec certains esprits éthérés.

Les artistes néoplatoniciens de la Renaissance étaient persuadés qu’ils étaient en train de redécouvrir d’anciens secrets… Comme Platon, ils pensaient que tout processus d’apprentissage n’était qu’une question de mémoire ou que nos esprits étaient les excroissances du Grand Esprit cosmique dans le monde matériel. Ils pensaient que tout ce qui avait été vécu ou pensé au cours de l’histoire se trouvait stocké dans la mémoire de cet esprit central ou vivait dans une sorte de « maintenant » éternel.

C’est ainsi qu’apparut l’idée du « génie hors du commun » à travers de grands artistes tels que Botticelli, Léonard de Vinci, Raphaël ou encore Michel-Ange. Un génie est une personne complètement à part, différente de nous par la magnificence et la clarté de ses visions…

Que cet épanouissement ait eu lieu en Italie était opportun, car il était une sorte de prolongement des visions extatiques de Joachim de Flore et de saint François d’Assise (voir Ouroboros 16). Comme les saints, les grands artistes étaient parfois les messagers des grandes entités spirituelles…

Raphaël

D’après la tradition ésotérique, le peintre Raphaël (1483 -1520) ou Raffaello Sanzio da Urbino de son vrai nom, était directement inspiré par l’archange du même nom et avait la main guidée par le divin lorsqu’il peignait ses chefs-d’œuvre.

Mais il existait aussi une tradition plus étrange et mystérieuse, qui disait que l’individualité qui s’était incarnée en Raphaël était autrefois saint Jean-Baptiste…

Pour Rudolf Steiner (1861 – 1925), le créateur de l’anthroposophie moderne, cela expliquait en partie pourquoi il n’existait aucune œuvre majeure de Raphaël dépeignant des événements postérieurs à la mort du Saint.

Pour beaucoup d’initiés, les chefs d’œuvre de Raphaël représentant la Madone et l’enfant ont une qualité unique, étrange et réellement fascinante, car ils semblent avoir été peints de mémoire !

Léonard de vinci

Léonard de vinci (Leonardo di ser Piero da Vinci, dit Leonardo da Vinci), né à Vinci le 15 avril 1452 et mort à Ambroise le 2 mai 1519, était un peintre florentin et un homme d’esprit universel… Il était à la fois artiste, scientifique, ingénieur, inventeur, anatomiste, peintre, sculpteur, architecte, urbaniste, botaniste, musicien, poète, philosophe et écrivain.

Après son enfance à Vinci, Léonard fut élevé auprès du célèbre peintre et sculpteur florentin Andrea del Verrocchio. Ses premiers travaux importants furent réalisés au service du duc Ludovic Sforza à Milan. Il oeuvra ensuite à Rome, Bologne et Venise et passa les dernières années de sa vie en France, à l’invitation du roi François 1er.

Léonard de Vinci est souvent décrit comme l’archétype et le symbole de l’homme de la Renaissance, un génie universel, un philosophe humaniste, observateur et expérimentateur, avec un « rare don de l’intuition de l’espace », et dont la curiosité infinie était seulement égalée par sa force d’invention.

Nombre d’auteurs et d’historiens le considèrent comme l’un des plus grands peintres de tous les temps et certains comme la personne la plus talentueuse, dans le plus grand nombre de domaines différents, ayant jamais vécu…

Au XVe siècle, de nombreux mages vivaient en Italie et travaillaient souvent en lien étroit avec l’atelier d’un peintre, là où le progrès artistique et spirituel allait de pair…

Luca Pacioli (1445 – 1517) fût l’un d’eux. Ce Franciscain, mathématicien et hermétiste est considéré aujourd’hui comme le père du principe connu sous le nom de « Comptabilité en partie double ».

La comptabilité en partie double est la base du système comptable utilisé par toutes les entreprises et organisations. Elle est fondée sur l’idée selon laquelle les opérations et la situation financière d’une organisation peuvent être représentées par des comptes. Chaque compte contient l’historique des modifications de la valeur monétaire d’un aspect particulier de l’organisation.

On parle de partie double quand l’enregistrement d’écriture est inscrit dans deux comptes (au moins) : un compte débité, et un compte crédité. Mais en réalité, il fut bien plus car c’est lui qui enseigna la « divine proportion » à Léonard de Vinci. Il fut aussi le premier à écrire ouvertement sur les formules magiques qui se cachent derrière le pentagramme vénusien.

Un autre mage, Leon Battista Alberti (1404 – 1472) exerça aussi une très forte influence sur Léonard. Il est connu comme étant l’architecte qui conçut le palais Rucellai à Florence, un des premiers édifices classiques de la Renaissance italienne, ainsi que de la façade de la basilique Santa Maria Novella.

Mais ce que beaucoup ignorent, c’est qu’il était aussi l’auteur d’un des livres les plus étranges de la langue italienne : Hypnerotomachia Poliphiliis ou Songe de Poliphile.

À la fin du « Songe de Poliphile », lorsque le héros est enfin uni à sa bien-aimée à travers une série de rituels mystiques dans le temple de Vénus, il est clairement question d’apprendre à canaliser les énergies sexuelles. Poliphile et sa bien-aimée goûtent au fruit de cet arbre et ils sont transportés dans un état de conscience supérieur.

Le pouvoir volcanique de la libido a été canalisé par la prêtresse initiée, si bien que toutes les règles prohibitives de bienséance, de moralité et de créativité, et même les lois de la nature, s’en trouvent bouleversées…

De même que son histoire se déroulait suivant la logique d’un rêve, Alberti proposait que la nouvelle architecture de la Renaissance, qu’il contribuait à créer, ait la logique d’un rêve. Au lieu de se comporter comme ceux des générations précédentes, les architectes devraient opérer dans un esprit de nouveauté et de liberté où rien ne serait interdit. Ils pourraient se laisser inspirer par des combinaisons de formes induites par des états de conscience altérés…

Alberti préconisait donc une sorte d’expérience du contrôle de la pensée, qui faciliterait l’apparition d’une nouvelle façon de penser, et pas seulement en architecture. Il était obsédé par la nature et les formes naturelles et il les incorpora à son œuvre de manière inhabituelle et surréaliste.

Quand on regarde attentivement les deux versions de la « Vierge aux rochers de Léonard de Vinci », cette même obsession apparaît dans la forme du paysage qui exprime aussi ce désir de spiritualité.

Mais le plus mystérieux de tous les chefs-d’œuvre de Léonard de Vinci et de la Renaissance est sans aucun doute la Joconde. Comment expliquer son pouvoir ?

Pour les initiés, la Joconde est plus vieille que les dieux, elle est morte bien des fois et elle connaît les secrets de la tombe… Elle est la tête sur laquelle toutes les fins du monde se sont rassemblées… Sa beauté charnelle est toute façonnée de l’intérieur ; en elle se sont déposées, cellule par cellule, pensées étranges, rêveries fantastiques et passions exquises…

Comme nous l’avons vu dans les premières vidéos d’Ouroboros, la Lune s’était séparée de la Terre pour pouvoir refléter la lumière du Soleil sur Terre et rendre possible la réflexion humaine. Le cosmos avait passé un temps infini à créer les conditions nécessaires à l’éclosion de la réflexion humaine, mais au début du XVe siècle, elle prenait enfin corps…

Le chef-d’œuvre de Léonard est donc une icône de l’histoire de l’humanité car l’artiste a capturé sur sa toile cette étape dans l’évolution de la conscience. Nous voyons pour la première fois sur le visage de la Joconde la joie de celle (ou celui) qui explore sa vie intérieure. Elle est libre de prendre du recul par rapport aux sensations qui l’assiègent et de vagabonder en elle-même…

Elle possède ce que John Ronald Reuel Tolkien, connu pour ses célèbres romans « Le Hobbit » et « Le Seigneur des anneaux », qualifia dans un autre contexte, d’« œil intérieur mobile, détaché et désencombré ».

La Joconde crée donc un espace magique propice à l’esprit d’Isis.

Il est impossible aujourd’hui de se trouver seul au Louvre, face à la Joconde ; mais comme « Le Lohan » du British Muséum, la céramique chinoise de la dynastie Liao représentant un moine bouddhiste, elle a été créée pour répondre si vous communiez avec elle…

Malheureusement, nous ne pourrons en dire plus, car certaines choses ne peuvent être révélées en dehors de certains cercles ! Laissons donc les artistes de la renaissance et intéressons-nous maintenant à l’une des femmes les plus célèbres du XVe siècle…

Jeanne d’Arc

Bien loin des fastes et de la grandeur des cours de la Renaissance italienne, dans la rustre Europe du Nord, un autre esprit faisait sentir sa présence. À l’âge de 13 ans, une jeune fille, vivant dans une simple ferme de la région forestière de Lorraine, à Domrémy, commença à entendre des voix et à avoir des visions. L’archange Saint Michel lui apparut et lui dit qu’elle serait guidée par des esprits…

Comme elle ne désirait pas vraiment obéir à l’ange, arguant qu’elle préférait rester auprès de sa mère, les voix se firent de plus en plus insistantes, et lui expliquèrent sa mission. Jeanne prétendait avoir reçu de la part des Saints Michel, Marguerite et Catherine la mission de délivrer la France de l’occupation Anglaise, de permettre au dauphin d’être sacré roi de France à Reims et ainsi d’inverser le cours de la guerre de Cent Ans…

Jeanne d’Arc (1412 – 1431) n’avait que 17 ans lorsqu’elle arriva à la cour du dauphin Charles. Ce dernier lui tendit un piège, laissant un courtisan s’asseoir sur le trône afin de se faire passer pour lui. Mais Jeanne s’en aperçut et s’adressa directement au Dauphin…

Convaincu de sa mission divine, ce dernier l’équipa d’un cheval blanc et d’une armure blanche. Elle la porta pendant six jours et six nuits, en selle, chevauchant sans répit… Jeanne eut alors la vision d’une épée cachée dans une église… L’épée qu’elle décrivit, avec ses trois croix caractéristiques, fut découverte cachée derrière l’autel de l’église Sainte-Catherine-de-Fierbois.

Il arrive parfois dans l’histoire de l’humanité que de grands êtres du monde des esprits déposent leurs pouvoirs en une personne en particulier qui, dès lors, a une puissance incontestable…

Quand le 28 avril 1429, la Pucelle arriva aux portes d’Orléans, occupée par l’ennemi, les troupes anglaises battirent en retraite devant la jeune femme et ses quelques partisans. Ils n’étaient que cinq cents et battirent pourtant une armée anglaise composée de milliers de soldats.

Puis sur ses divins conseils, le dauphin fut couronné roi de France à Reims. Elle avait accomplit sa mission en moins de trois mois…

Cependant, après avoir été trahie, elle fut capturée par les Bourguignons à Compiègne et vendue aux Anglais par Jean de Luxembourg, comte de Ligny, pour la somme de dix mille livres !

Il n’y a pas d’exemple plus flagrant de l’influence du monde des esprits sur le cours de l’histoire.

Elle fut longuement interrogée sur les voix qu’elle entendait et elle déclara que ces dernières étaient parfois accompagnées de visions et de lumières vives, qui la conseillaient, la mettaient en garde et lui donnaient également des instructions détaillées. Mais à cette époque, une telle familiarité, une communication si détaillée et profonde avec le monde des esprits était considérée aux yeux de l’Eglise comme de la sorcellerie…

Après un procès en hérésie conduit par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais et ancien recteur de l’université de Paris, Jeanne fut brûlée vive le 30 mai 1431, sur le bûcher de la place du marché à Rouen…

Un soldat anglais dira alors : « Nous avons brûlé une sainte. »

Entaché de nombreuses irrégularités, ce procès fut cassé par le pape Calixte III en 1456 ; un second procès, en réhabilitation, fut instruit, conclut à son innocence et l’éleva au rang de martyre. Jeanne fut béatifiée le 18 avril 1909 et canonisée le 30 mai 1920.

Elle est devenue une des quatre saintes patronnes secondaires de la France, et dans le monde entier une personnalité mythique qui a inspiré une multitude d’oeuvres littéraires, historiques, musicales, dramatiques et cinématographiques…

Les Anglais la considéraient comme une ennemie mais, d’après l’histoire secrète, ce fut l’Angleterre qui profita le plus des actions de Jeanne d’Arc, d’inspiration divine !

La France et l’Angleterre avaient été en conflit depuis des centaines d’années et, même si à l’époque de Jeanne, l’Angleterre dominait militairement, elle était culturellement dominée par la langue et la littérature françaises. Si Jeanne n’avait pas séparé les deux pays, la contribution particulière que l’Angleterre allait apporter à l’histoire du monde, le réalisme psychologique de Shakespeare ou encore la philosophie tolérante et objective de Francis Bacon, n’aurait jamais vu le jour…

Albrecht Dürer

A cette époque, Le peintre Albrecht Dürer (1471- 1528) retournait en Allemagne, après un voyage en Italie, où il avait été initié aux connaissances ésotériques de la guilde des peintres.

D’étranges visions de l’Apocalypse commencèrent à inspirer ses gravures. Il peignit également un autoportrait en initié, tenant à la main un chardon en fleur, étincelant de rosée (la sueur des étoiles), signe que ses organes de vision spirituelle s’ouvraient sur une aube nouvelle.

Sur le chemin du retour, il s’arrêta sur le bas-côté pour peindre une touffe d’herbe. Cette aquarelle fut la première nature morte. Dans l’histoire de l’art, rien ne laissait prévoir cette évolution.

Avant Dürer, personne n’avait jamais regardé un rocher ou une touffe d’herbe de cette manière !

Le voyage de Dürer doit aussi être compris comme un signe du cheminement de l’évolution de la conscience… Cette dernière gagnait le nord de l’Europe. Les gens du Nord allaient se trouver en désaccord avec les pays catholiques du Sud, plus rigides. Les développements politiques virent l’essor d’États du Nord qui venaient d’acquérir une nouvelle puissance et allaient devenir les véhicules de nouvelles formes de conscience…

Une cinquantaine d’années après que les pas de Jeanne eurent cessé d’y résonner, un homme marchant dans les rues étroites de Chinon allait lui aussi entrer dans l’histoire. Sa vie et son œuvre étaient animées de l’esprit des troubadours.

Alors que Dante, l’homme du Sud, écrivait en aspirant à s’élever spirituellement, lui semblait se délecter, du moins à première vue, du monde matériel…

François Rabelais

François Rabelais (également connu sous le pseudonyme Alcofribas Nasier, anagramme de François Rabelais, ou bien encore sous celui de Seraphin Calobarsy) fut un prêtre catholique évangélique, un médecin et l’un des plus grands écrivain humaniste français de la Renaissance.

Il naquit à La Devinière à Seuilly, près de Chinon (dans l’ancienne province de Touraine), à une date indéterminée entre 1483 et 1495, et mourut à Paris le 9 avril 1553.

Ses œuvres, comme Pantagruel (1532) et Gargantua (1534), qui tiennent à la fois du conte avec leurs personnages de géants, de la parodie héroï-comique de l’épopée et du roman de chevalerie mais qui préfigurent aussi le roman réaliste et satirique, sont considérées comme une des premières formes du roman moderne. Elles racontent des histoires de géants saccageant la terre et faisant des ravages pour satisfaire leur appétit colossal.

Ainsi, le plaisir que les troubadours trouvaient à évoquer les objets usuels prit un nouveau tour, humoristique, sous la plume de Rabelais.

Dans Gargantua, il dresse une longue liste d’objets pouvant servir à s’essuyer le derrière : un masque en velours de dame, un bonnet de page à plume à la mode suisse, un chat, de la sauge, du fenouil, des feuilles d’épinard, des draps, des rideaux, un poulet, un Cormoran et une loutre.

Avec Rabelais, la longue lutte pour s’éveiller au monde matériel qui avait commencé avec Noé était enfin arrivée à son terme et le résultat était délicieux… Dans sa prose dense et percutante, l’amour de la lumière et du rire, de la nourriture et de la boisson, de la bagarre et du sexe menaient la danse.

Dans les pages de Rabelais, le monde n’est plus cet endroit horrible que l’Église de Rome avait essayé de créer. La philosophie catholique niant la vie y était même considérée comme malsaine !

Rabelais disait : « Le rire est le propre de l’homme ».

Pour lui, le rire, la joie et la bonne humeur étaient des remèdes pour l’esprit comme pour le corps, qui, grâce à cela, pouvaient être transformés. Cependant, un courant initiatique insidieux était aussi perceptible dans son écriture. Rabelais était un mystique, mais pas dans la mouvance transcendante du Moyen Âge…

Les troubadours avaient écrit sur la folie de l’amour et certains d’entre eux s’étaient décrits comme des bouffons ou des fous. Ils signifiaient par là qu’ils avaient trouvé de nouvelles manières d’entrer dans le monde des esprits et que, quand ils en revenaient, ils voyaient la vie sens dessus dessous, à l’envers.

La réalité quotidienne semblait alors très différente aux troubadours et Rabelais, lui, avait réussi à transformer cette nouvelle vision en récit. Il avait inventé un style d’humour subversif qui deviendra plus tard caractéristique des auteurs initiatiques tels que Jonathan Swift, Voltaire, Lewis Carroll ou encore André Breton.

Non seulement Rabelais s’aperçut qu’il pouvait se déchaîner dans le monde des esprits avec une liberté toute neuve mais, quand il en revenait, il était incapable de prendre au sérieux les croyances des gens à ce sujet, leur conformisme et leur moralité.

L’abbaye de Thélème est la première utopie de la littérature française, décrite par Rabelais au chapitre LVII de son Gargantua (première publication en 1534 ou 1535). Ses héros construisent l’abbaye de Thélème, qui porte inscrit sur son portail : « Fais ce que tu voudras » ;

En réalité, Rabelais imaginait ses héros comme des initiés dont la conscience était si avancée qu’ils étaient au-delà du bien et du mal… C’est cette même symbolique qui a toujours été cachée dans l’arcane du « FOU », la lame la plus emblématique du tarot divinatoire, et dont l’image apparaissait aussi sur le frontispice de la première édition de son « Pantagruel » en 1532.

Le Fou poursuit le « chemin sans nom ». Le bâton sur son épaule représente la dimension végétale de son être qui se situe entre la partie spirituelle et la partie animale qui est en dessous. Quant au chien qui lui mord le mollet, il représente les éléments animaux corrompus et non expiés, comme le baluchon représente les éléments végétaux de même nature. Son chapeau à trois pointes fait allusion aux corps supérieurs qu’il doit encore atteindre, les corps animal, végétal et minéral métamorphosés, et son regard en l’air montre son aspiration à les atteindre… Si sa barbe représente une poussée vers le bas, son chapeau lui, qui se dresse vers le haut, montre le troisième œil sur le point de s’ouvrir.

Une allusion à peine voilée de l’Ājñā, le sixième des sept Chakra majeurs du tantrisme hindou, localisé dans le cerveau au niveau de la glande pinéale.

À la fin du roman, après de nombreux voyages d’exploration sur les mers, ayant vu bien des prodiges, après s’être battus avec des hommes chats, des armées de saucisses et des géants dévoreurs de moulins à vent, les héros arrivent enfin sur une île mystérieuse.

Fulcanelli, le grand Adepte alchimiste du XXe siècle expliqua que, par cette arrivée, Rabelais voulait dire que ses héros entraient dans la Matrice… Ils sont menés dans la pièce d’initiation d’un temple souterrain.

Les histoires de souterrain indiquent toujours qu’il est question de physiologie occulte et le voyage souterrain doit être assimilé à un voyage dans le corps. Au centre du temple, dans sa partie la plus souterraine, se trouve une fontaine de vie sacrée…

Fulcanelli souligne que Rabelais laisse transparaître ses intérêts ésotériques et alchimiques dans la description de cette fontaine, qui a sept colonnes, consacrées aux sept planètes.

Chaque dieu planétaire porte la pierre qui lui est attribuée, ainsi que son métal et son symbole alchimique. Une image de Saturne est suspendue au-dessus d’une colonne, une faux et une grue à ses pieds.

Le plus significatif est Mercure, qui est décrit comme « figé, ferme et malléable », ce qui signifie « semi-solidifié » dans le processus de transmutation alchimique. Ce qui coule de la fontaine et que les pèlerins boivent, c’est du vin…

Pour Rabelais boire est aussi le propre de l’homme :

« Et ici maintenons que non rire, ainsi boire est le propre de l’homme… Je ne dis boire simplement et absolument, car aussi bien boivent les bêtes, je dis boire vin bon et frais.

Notez, amis, que de vin divin on devient, et n’y a argument tant sur, ni art de divination moins fallace. Vos académiques l’affirment, rendant l’étymologie de vin, lequel ils disent en grec oínos, être comme vis, force, puissance, car pouvoir il a d’emplir l’âme de toute vérité, tout savoir et philosophie. »

Dans certaines physiologies occultes orientales, le vin est aussi utilisé comme symbole des sécrétions du cerveau qui passent dans la conscience lors des états extatiques.

Au XXe siècle, des scientifiques indiens sont même allés jusqu’à dire que le terme « vin » dans les textes védiques se réfère à ce que nous appelons aujourd’hui la diméthyltryptamine, l’enzyme qui descend des régions les plus élevées du cervelet.

Paramahansa Yogananda (1893 – 1952), le yogi et guru (précepteur spirituel) de grande renommée qui a fit la promotion du Kriya Yoga en Occident, parlait lui aussi des sécrétions neurophysiologiques. Il les appelait « l’amrita bienheureuse », le nectar d’immortalité qui provoque des moments de conscience illuminée et qui nous permet de percevoir directement les grandes idées qui tissent le monde matériel…

Mais, c’est aussi à ce même symbole que faisait allusion le grand maître soufi Khawâdjâ Abdallâh al-Ansârî[ (1006 – 1089), dont les recueils en vers comptent parmi les chefs-d’œuvre de la littérature persane, lorsqu’il écrivit :

« Ô Seigneur, enivrez-moi du vin de Votre amour ».

A la fin du XVe siècle, la profusion des découvertes qui allaient conduire à la révolution scientifique poussait également les hommes à l’exploration du monde.

Jamais l’émerveillement face au monde matériel n’avait été aussi fort…

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