Mystique

De RAGNARÖK à YGGDRASIL

Le Ragnarök est un récit prophétique qui terrifiait les hommes du nord de l’ancien temps. Cette apocalypse de la culture scandinave annonce le crépuscule des puissants et des orgueilleux.

Ce mythe conte la perdition des hommes pétris de vanité après que chacun se soit arrogé le titre de dieu. Le monde des hommes sera alors au bord du précipice.

À ce point de rupture, les forces colossales accumulées se libèreront dans un déchainement sans précédent. L’entropie, dissipation de cette énergie néfaste, est la force purificatrice qui sous-tend le mythe du Ragnarök :

« ragna » pour la puissance divine
« rök » pour le jugement et le destin


Cette force est l’expression du jugement de Dieu nécessaire à l’émergence d’un monde nouveau. Le Ragnarök est un reflet de la destruction à l’œuvre des structures externes de l’homme, causé initialement par l’effondrement de son Pilier intérieur.

Le Ragnarök ou l’effondrement

Cette bataille sonnant la fin du Monde d’Avant se déroule en deux temps. Je prends le parti de retirer tous les noms archétypaux de la mythologie nordique afin de faciliter la mise en parallèle avec les temps actuels. Je donne volontairement une lecture sous un prisme personnel.

La tradition orale scandinave relate en détail l’amorce de cette dernière grande confrontation entre les forces du Bien et les forces du Mal.

Sera tout d’abord libéré celui qui fut longtemps enchaîné à cause de sa noirceur. Plus longtemps il fut entravé, plus sa férocité s’accrut. Une fois sa chaîne brisée, il se ruera sur le Porteur de Lumière afin de la dévorer et plonger le monde dans l’obscurité. Les hommes seront coupés de la Lumière.


Tous les séides du camp du Mal se libèreront et se déverseront sur le monde des hommes, le champ de bataille à venir. Le monde se laissera petit à petit plonger dans les ténèbres.

Les hommes et ceux au Panthéon des hommes se revendiqueront d’un camp ou de l’autre.

Qu’ils représentent les forces du Bien ou celles du Mal, ils resteront attachés à la dualité du monde, à la philosophie des extrêmes. Celle-ci prône les choix absolus. Tuer ou être tué. Soumettre ou se soumettre. Convaincre ou adopter. Amener l’autre dans son camp ou repousser le camp opposé.

Tout commencera réellement lorsque le gardien du royaume souterrain poussera des hurlements afin d’appeler à prendre part à la grande bataille. Tous ceux qui agissaient dans l’ombre se révèleront alors à la face du monde.

Les armées se rassembleront en provenance de tous les horizons.

Le bruit terrible accompagnant leur marche fera s’effondrer le Pont reliant Dieu aux hommes. Ceux-ci se retrouveront livrés à eux-mêmes. L’absence d’une voie d’accès à la Lumière réduira en apparence leur choix entre ce qui leur sera présenté comme le Bien et ce qui leur sera définit comme le Mal.

Une bataille effroyable s’engagera. Celui qui fera périr son adversaire par l’épée, soit périra sous des coups vengeurs, soit s’effondrera de faiblesse ou encore succombera de ses blessures. La loi de résonance transparaîtra dans une immédiateté croissante. Le premier tranchant de l’épée de la Justice divine moissonnera inlassablement.

Peu de protagonistes resteront en vie lors des derniers soubresauts de combats.

Alors s’abattra sur eux la colère de la Terre-Mère, l’autre tranchant de l’épée de la Justice divine. Les montagnes s’effondreront, les mers déborderont. Tout sera renouvelé et purifié sur le monde des hommes.

L’Yggdrasil ou l’émergence

Les forêts réapparaîtront, les sources d’eau rejailliront, les terres réémergeront. La Vie réapparaîtra en tout lieu. Un nouveau Porteur de Lumière descendra afin de conduire le monde renouvelé.

Après la bataille de la fin du Monde d’Avant sera ressuscité le Dieu de la Joie, de la Beauté et de la Compassion.

Ce Dieu retrouvera ceux parmi le monde des hommes qui auront survécu. Ils se seront réfugiés dans l’Arbre de Vie ou Yggdrasil. Parce qu’ils n’auront pris part à aucun affrontement, commis aucun crime, ils seront épargnés par la Justice divine.

Ils ne se seront pas laissés abaisser au regard de Dieu.

Se soustrayant aux seuls choix proposés par la dualité, ils se mirent hors d’atteinte de la colère de la Terre-Mère. Ils laissèrent les extrêmes hurler leurs cris de guerre. Ils cessèrent d’apporter leur voix à tel ou tel camp. Ils les laissèrent porter les premiers coups ou mener vengeance. Et lorsque les tenants de la dualité seront suffisamment épuisés et réduits en nombre, la colère divine purifia le champ de bataille. Ainsi chaque protagoniste survivant comprendra la vacuité de son combat.

Dans la conflagration finale qui embrasera l’Ancien Monde, le mythe du Ragnarök enseignent que seuls ceux qui ne prendront pas part activement aux évènements survivront.

En se mettant en retrait des fléaux de l’homme, ils trouveront une option oubliée. Ils ne tenteront pas de créer un autre Monde ou de sauver l’Ancien Monde. Puisque le Pont avec le Ciel fut foudroyé, ils se réfugieront dans l’Arbre de Vie. Ils le retrouveront éclos en eux-mêmes, dans leur Cœur Sacré. Et ce nouveau Porteur de Lumière, ce dieu de la Joie, de la Beauté et de la Compassion, ne ressuscitera pas cette fois-ci en un homme ou un fils de Dieu. Il reviendra mais pas telle que l’Espérance des hommes s’y attendra.

Le mythe du Ragnarök édicte clairement que le Dieu solaire retrouvera homme et femme dans leur Arbre de Vie… et seulement après sera édifié le Monde d’Après.

L’Yggdrasil est le principe suprême du devenir spirituel de l’homme. Les forces de la nature détiennent une place prépondérante dans l’imaginaire nordique. L’Yggdrasil apparaît comme le point stabilisateur et sécurisant. Il est le Pilier du monde intérieur dont il assure l’équilibre. Ce qui se bâtira à l’intérieur du Cœur de l’homme relèvera les ruines du monde extérieur.

L’Yggdrasil est l’édification du Cœur sacré
car c’est dans les cœurs que toutes les batailles se remportent.

Samuel


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