Tentations et menaces autoritaires agitent nos sociétés, tandis que les démocraties perdent du terrain. Entre 2015 et 2021, le nombre de démocraties est passé de 104 (63?% des pays de la planète) à 98 (soit 56%).
Certains refusent de nommer la dictature, d’aucuns l’appellent démocratie, d’autres encore ne savent pas la définir. Pourtant, démocratures, protototalitarismes, totalitarisme islamiste, dinosaures communistes remastérisés, autocraties néo-sultaniques ou juntes militaires sous des formes multiples, on voit bien que la dictature reste une réalité terriblement actuelle.
Comment les dictatures adviennent-elles, comment y résiste-t-on, comment cèdent-elles le pas, comment juger leurs crimes ?
Dans son livre : « Cinquante nuances de dictature. Tentations et emprises autoritaires en France et ailleurs », Renée Fregosi nous invite à une réflexion critique sur la dictature d’aujourd’hui pour défendre la démocratie et envisager l’avenir.
Le conflit israélo-palestinien et la « Solution Doliprane » de deux états pour deux peuples
Pour avancer vers une solution à deux États, toutes les parties devraient prendre leurs responsabilités et cesser les postures rituelles.
À la suite du scandale de l’implication dans le massacre du 7 octobre , de plusieurs employés de dans la bande de Gaza, au-delà de la suspension du financement de l’agence onusienne, c’est la question même des « réfugiés palestiniens » qui est enfin posée.
En effet, tandis que plus de 800 000 Juifs furent expulsés des pays arabes ou contraints à l’exil après 1947 sans que ne leur soit en rien reconnu un quelconque statut de réfugiés, ne serait-ce que temporaire, personne ne s’est s’offusqué jusqu’à aujourd’hui, ni même étonné de l’incongruité du statut de réfugiés à vie et sur plusieurs générations, dont bénéficient aux frais de la communauté internationale, les Arabes de qui ont quitté leurs villages entre 1947 et 1949 et de tous leurs descendants sans fin.
Par ailleurs, le règlement définitif de la question d’un État palestinien voisin de l’État d’Israël se repose avec acuité sous la forme « du jour d’après ».
Or réside dans le manque flagrant d’interlocuteurs palestiniens véritablement désireux de prendre en charge un État palestinien. Car c’est une chose de proclamer l’existence de l’État « Palestine », « au nom de Dieu et du peuple palestinien » (comme l’a fait l’OLP en 1988) et de faire campagne pour que cet État virtuel soit reconnu par les organisations internationales et tous les États de la planète, une autre est de prendre la responsabilité de sa création réelle et de sa gestion raisonnée en respectant son voisin, l’État d’Israël.
Les leaders palestiniens ne veulent pas d’un État « à côté » d’Israël
Les belles âmes appellent aujourd’hui à la création urgente d’un État palestinien pour assurer qu’ils bâtissent « une feuille de route vers la paix » et exigent qu’Israël l’adopte sans délai. Certes, l’extrême droite israélienne travaille depuis longtemps à la construction dudit « grand Israël », et aujourd’hui, elle est représentée par ceux qui, par ailleurs, ont en tête un agenda tout personnel en poursuivant la destruction – indispensable au demeurant – des infrastructures du Hamas à Gaza.
Mais les dirigeants occidentaux semblent ignorer que si, aujourd’hui, une majorité d’Israéliens [bien au-delà des soutiens à Benyamin Netanyahou] ne croient plus dans « la solution à deux États », c’est que les massacres génocidaires du 7 octobre et les vagues d’antisémitisme qui ont immédiatement suivi n’ont fait que confirmer ce sentiment qui n’a cessé de se renforcer au fil du temps : les leaders palestiniens, quels qu’ils soient, ne veulent pas d’un État « à côté » d’Israël, quelles qu’en soient les frontières et la capitale.
Ainsi, « un sondage réalisé trois semaines après les attaques a révélé que 28,6 % des Israéliens juifs étaient en faveur d’une solution à deux États, contre 37,5 % un mois plus tôt, selon le sondage Peace Index de l’université de Tel-Aviv ».
La solution à deux États partagée par aucune des parties
Ce net décrochage dans l’opinion publique israélienne, dû bien sûr au traumatisme des massacres, fait toutefois suite à une lente dégradation amorcée depuis les années 2000.
Pourquoi le mouvement Shalom Archav (La Paix maintenant) est-il à ce point affaibli ? Ne serait-ce pas parce qu’en Israël, les partisans sincères de « la solution à deux États » n’ont jamais trouvé de partenaires palestiniens fiables après avoir signé des accords de paix ? Et que dire de tous ces kibboutzniks de gauche, massacrés le 7 octobre parfois grâce aux renseignements fournis par ces Gazaouis mêmes qu’ils croyaient leurs amis et qu’ils avaient soutenus et aidés ?
D’ailleurs, le 17 janvier dernier, le chef du Hamas à l’étranger, Khaled Meshaal, n’a-t-il pas déclaré :
« Nous rejetons l’idée d’une solution à deux États. Notre objectif est clair : un État palestinien du fleuve à la mer, du nord au sud.
Le 7 octobre a renouvelé le rêve et l’espoir » de cette Palestine.
Si des naïfs ont voulu croire que le Hamas accepterait « un État dans les frontières de 1967 », les voilà éclairés. Mais dans le fond, que le Hamas ne puisse être un interlocuteur pour mettre en œuvre à court terme « la solution à deux États », cette opinion est très largement partagée. Simplement, cette position vient de loin et se trouve soutenue bien au-delà des groupes djihadistes palestiniens.
C’est toujours à l’initiative de coalitions internationales ou d’Israël que des négociations se sont amorcées
À l’époque de la Palestine mandataire sous domination britannique, les Arabes avaient refusé ouvertement que ce soit sous la forme « d’un foyer national juif » selon la formule de la déclaration Balfour en 1917 ou suivant un plan de partage proposé déjà par la « Commission Peel » en 1937 puis dans le « Livre blanc » en 1939.
Ces tentatives s’étaient soldées in fine par des violences à l’encontre des populations juives de Palestine. Le « plan de partition » de l’ONU de 1947 déclencha le même refus, l’agression du jeune État israélien à peine né, par les armées des pays arabes qui l’encerclaient, et en représailles à la création d’Israël, au moins 800 000 Juifs furent chassés des pays arabes ou contraints de fuir.
Elles ont été remis en cause par la poursuite du terrorisme palestinien sur les populations israéliennes, les initiatives diplomatiques de 2000-2001 ont quant à elles été contrées par « la seconde intifada », et la tentative de relance du dialogue en 2003 s’est enlisée malgré le démantèlement des implantations dans la bande de Gaza et l’évacuation de la zone par Israël en 2005.
Si certains responsables israéliens ont une part de responsabilité dans ces échecs successifs, il est choquant qu’elle soit toujours la seule à être mise en avant tandis que « le refus palestinien d’un État juif » fait systématiquement l’objet d’un déni.
Pourtant, depuis les années 1990, c’est toujours à l’initiative de coalitions internationales ou d’Israël, et jamais à partir de projets de « solution à deux États » qu’aurait pu avancer l’OLP, que des négociations se sont amorcées.
Chaque partie doit prendre ses responsabilités pour avancer vers « la solution à deux États »
Après les traités de paix signés avec l’Égypte en 1979 et avec la Jordanie en 1994, la rupture des négociations israélo-palestiniennes par Yasser Arafat en 2000 à Camp David, puis l’impossible négociation de Taba en 2001 sur fond de « seconde intifada » ont fait envisager à Israël la perspective d’un contournement du « problème palestinien ».
C’est ainsi que les « accords d’Abraham », actant la reconnaissance de la légitimité de l’État d’Israël par les Émirats arabes unis et le Bahreïn en 2020, ont rouvert le processus de normalisation de l’État hébreu avec ses voisins.
Certes sous la pression de leurs « rues » propalestiniennes respectives après le 7 octobre, les pays musulmans de la région ont interrompu ce processus de rapprochement avec Israël, mais ils y reviendront probablement après la fin de l’opération de Tsahal dans la bande de Gaza, en fonction de leurs intérêts économiques et stratégiques.
Il faudra alors que chacun prenne ses responsabilités, et cette fois, les pays arabes ne devront plus s’y soustraire. Ce sont eux, en premier lieu, qui doivent en effet régler la question des « réfugiés palestiniens » en intégrant dignement leurs « frères » dans leurs États respectifs et/ou en garantissant la viabilité pacifique d’un État palestinien qui ne menacerait plus son voisin israélien dans son être et dans son droit légitime à l’existence.
Mais pour cela, et si l’on veut que « la solution à deux États » ne reste pas une formule incantatoire, il faut aussi avoir le courage de lutter contre l’idéologie islamiste, des Frères musulmans notamment mais pas seulement, cultivant la haine des juifs, qui est sans doute le frein le plus important à la coexistence d’un État palestinien à côté d’Israël.
Renée Fregosi. Philosophe et politologue. Présidente du CECIEC. Membre de Dhimmi Watch et de l’Observatoire des idéologies identitaires.
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