Le magnat des médias russes Dmitri Itskov dirige « Avatar », un projet de recherche multidisciplinaire extrêmement ambitieux et de grande envergure qui vise à atteindre l’immortalité chez l’homme au cours des trois prochaines décennies.
Il prévoit de le faire en hébergeant des cerveaux humains dans des véhicules de plus en plus désincarnés, en les transplantant d’abord dans des robots, puis, d’ici 2045, en procédant à la rétro-ingénierie du cerveau humain et en «téléchargeant» efficacement la conscience humaine sur une puce informatique.
Fait ou fiction?
Lorsque l’on spécule sur des objectifs apparemment impossibles à atteindre comme celui-ci, il faut faire attention de ne pas croire que des avancées technologiques improbables deviennent automatiquement plus probables simplement en regardant plus loin dans l’avenir. C’est le piège cognitif qui, par exemple, a vu de nombreux experts informatiques de premier plan prédire le développement d’une intelligence artificielle à l’échelle humaine dans environ vingt ans dans le futur pendant au moins les cinq dernières décennies.
En regardant la chronologie proposée par Avatar, le projet d’Itskov semble souffrir du même sophisme. Certes, si nous empruntons la règle de Carl Sagan selon laquelle « les réclamations extraordinaires exigent des preuves extraordinaires », le projet échoue pour le moment ; il a cependant le mérite de fonder la plupart de ses démarches sur une technologie en gestation ou d’intérêt général. Et avec le rythme de l’évolution technologique qui continue de s’accélérer, les objectifs du projet peuvent être à portée de main, mais pas nécessairement dans les délais agressifs du projet.
La feuille de route vers l’immortalité
La première des étapes proposées, à achever avant la fin de la décennie, serait de créer un « avatar » androïde entièrement contrôlé par une interface cerveau-ordinateur.
Le système serait d’abord intéressant pour les personnes à mobilité réduite, mais pourrait également permettre aux personnes de travailler dans des environnements dangereux ou d’effectuer des opérations de sauvetage dangereuses.
Aussi futuriste que puisse paraître cette vision, Itskov n’est pas le seul à la partager.
La DARPA a alloué 7 millions de dollars du budget de l’année prochaine au développement d’interfaces permettant à un soldat de guider une machine bipède semi-autonome et de lui permettre d’agir comme substitut du soldat.
D’autres chercheurs ont rapporté être capables d’exercer un contrôle de base sur le mouvement d’un robot humanoïde en utilisant uniquement les ondes cérébrales , et beaucoup travaillent à affiner cette technologie.
La deuxième étape serait la création d’un système d’assistance à la vie autonome pour le cerveau humain, qui pourrait ensuite être intégré à l' »avatar » précédemment développé d’ici 2025.
Si les efforts sont couronnés de succès, les patients immobiles avec un cerveau intact pourraient retrouver la capacité de se déplacer via leurs nouveaux corps synthétiques, et une gamme variée de dispositifs bio-électroniques pourraient devenir possibles, créant des superpositions de systèmes électroniques et biologiques.
Peu de recherches sont en cours à ce sujet pour le moment – en fait, la correspondance la plus proche devrait être la recherche du Dr Robert J. White qui, dans les années 70, a réussi à effectuer plusieurs greffes de tête chez des singes. Construire un environnement artificiel dans lequel un cerveau pourrait non seulement survivre, mais aussi continuer à fonctionner pleinement, s’avérera certainement une tâche beaucoup plus difficile.
D’ici 2035, Itskov espère être en mesure de rétroconcevoir le cerveau humain et de trouver un moyen de « télécharger » sa conscience dans une version synthétique.
Couplé aux avancées précédentes, cela permettrait aux humains d’atteindre l’immortalité cybernétique. Cela conduirait également à la création d’une intelligence artificielle de type humain, et offrirait même aux gens ordinaires la possibilité de restaurer ou d’améliorer leur propre cerveau, par exemple en manipulant des souvenirs.
Bien qu’il n’y ait pas de recherche actuelle sur le transfert de votre conscience dans une puce de silicium, les neuroscientifiques s’intéressent beaucoup à une meilleure compréhension du fonctionnement interne du cerveau. Bien que nous ne fassions qu’effleurer la surface, les progrès récents – comme un bras robotique capable d’analyser les schémas électriques de neurones individuels – sont certainement des pas dans la bonne direction.
La quatrième et dernière étape est aussi la plus science-fictionnelle.
D’ici 2045, Itskov aimerait voir des «esprits indépendants de la substance» téléchargés non pas sur une puce informatique, mais dans des corps de compositions différentes. Un corps holographique pourrait traverser les murs ou se déplacer à la vitesse de la lumière, tandis qu’un corps constitué de nanorobots serait capable de prendre plusieurs formes différentes à volonté.
« L’humanité, pour la première fois de son histoire, fera une transition évolutive entièrement gérée et finira par devenir une nouvelle espèce », écrit-il.
Financement et soutien
Itskov dit qu’il a investi beaucoup de son propre argent pour lancer les recherches nécessaires, embauchant 30 scientifiques pour atteindre cet objectif, organisant des réunions, avec des plans pour établir des bureaux à San Francisco plus tard cet été. Il travaille également sur la construction d’un réseau social pour sensibiliser à son initiative, et sur un « incubateur d’entreprises » pour la création d’applications commerciales – principalement dans le domaine médical – qui capitaliseraient sur la recherche et financeraient le développement ultérieur.
En d’autres termes, aussi fou que cela puisse paraître, Itskov est absolument sérieux à ce sujet, et les roues tournent sur ce projet.
Bien sûr, le rythme même de la recherche scientifique nécessaire pour faire réussir ce projet nécessitera des capitaux très importants – peut-être prohibitifs. Pour résoudre ce problème, Itskov a récemment adressé une lettre aux milliardaires de la liste Forbes la plus riche dans le cadre d’un appel de fonds, mais il recherche également le soutien du gouvernement.
Étonnamment, le ministère russe de l’Éducation et des Sciences a annoncé son soutien à l’initiative et a prévu des pourparlers pour discuter d’un centre de recherche et développement spécialisé. Curieusement, l’initiative a également reçu le soutien et la bénédiction du Dalaï Lama.
La vidéo ci-dessus est une courte présentation détaillant les étapes et les objectifs du projet « Avatar ».
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