Secrets révélés

Magouilles et corruption des élites 12 – Stratégie de la tension et corruption en Belgique

Continuons notre saga de la corruption des élites européennes avec le cas de la Belgique à la grande époque du réseau stay-behind, des années 50 aux années 90. Où l’on retrouve la combinaison gagnante: politique, magouilles, extrême-droite, obstruction judiciaire. Avec à la clé deux vagues de massacres restées impunies, quelques meurtres, beaucoup de trafics et d’argent détourné.

Et des réseaux pédocriminels, doit-on ajouter, mais on en reparlera plus tard.

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Le cas de la Belgique est un peu particulier, tant les liens des services belges avec leurs homologues Anglais en particulier, mais aussi avec les US, étaient étroits depuis le début du XXe siècle et la Première Guerre mondiale. Ce n’est pas pour rien que l’OTAN s’y est installée après avoir éjectée de France par de Gaulle. Dès 1947 et le déploiement du plan Marshall, les intérêts US et ceux des industriels Belges se sont rejoints, notamment autour de la « construction européenne ».

En novembre 1990, le scandale Gladio qui a traversé l’Europe n’a pas épargné la Belgique, où le ministre de la Défense Guy Coëme a été obligé d’admettre qu’une armée secrète liée à l’OTAN existait bel et bien. Mais il a dit qu’il n’était pas au courant, tout comme le le 1er ministre et le reste du gouvernement. Le Sénat a tout de même pu mettre en place une commission d’enquête qui a permis d’éclaircir certains points, mais a laissé d’énormes zones d’ombre comme c’est le cas de toutes les commissions d’enquête parlementaire.


Et moins d’un mois après le déclenchement du scandale qui a suivi les déclarations du 1er ministre italien Giulio Andreotti, le 23 novembre 1990, le gouvernement belge a décidé de supprimer une partie du « service clandestin » et de cesser officiellement sa participation à ce groupe atlantiste qui n’avait plus rien de secret malgré les dénégations et tentatives de minimisation officielles.

D’après le témoignage donné par André Moyen, un ancien des renseignements et du stay-behind, le ministre de l’Intérieur Vleeschauwer l’a envoyé rencontrer son homologue italien dès septembre 1945, le ministre de l’Intérieur Mario Scelba, « avec pour mission d’élaborer des stratégies pour empêcher les communistes d’accéder au pouvoir », écrit Daniele Ganser, « La Guerre froide touchant à sa fin, Moyen confirma à ses anciens ennemis que, durant des années de service actif, il avait directement participé à l’Opération Gladio et à des missions secrètes contre les partis communistes de nombreux pays ».

Le réseau stay-behind belge a été mis en place à partir de 1949, avec une branche liée aux renseignements de l’armée, le SGR (Service général du renseignement), chargé du renseignement, et aussi d’agir en cas d’invasion soviétique. Il y avait aussi une branche civile, dépendant des services secrets de la police, la Sureté de l’Etat, qui s’appelait le STC/mob (Section Training Communication and Mobilisation). Mais, les choses ont un peu trainé, en raison des crises internes, une constante dans ce pays dont la devise est pourtant « l’union fait la force ».

Mise en place du stay-behind en Belgique

Dès 1947, la collaboration entre la Sûreté de l’Etat et la CIA était lancée, pour remplir comme le disait le 1er ministre et futur secrétaire général de l’OTAN Paul-Henri Spaak, une « mission commune » contre les « activités communistes en Belgique et dans les pays voisins » [1]. Depuis, la Belgique est une véritable tête de pont, voire un laboratoire de l’influence US en Europe.


C’est aussi dès 1947 que le ministre de l’intérieur belge a sollicité un responsable des renseignements militaires ayant collaboré avec l’OSS pendant la guerre puis avec la CIA[2], André Moyen, pour prendre contact avec le patron du SDECE (renseignements français) Henri Ribière afin de collaborer au développement du stay-behind[3]. Le tout avec la bénédiction de Jules Moch, ministre de l’Intérieur français.

Moyen a immédiatement entrepris de constituer un réseau privé de renseignement anticommuniste appelé Milpol, financé par des banques belges, qui transmettait ses informations au SDRA. Le réseau a été étendu au Congo Belge sous le nom de « Crocodile » à la demande de Herman Robiliart, responsable de L’Union minière[4]. A partir de là, Moyen a assuré la liaison entre les réseaux stay-behind Belge et Français.

Moyen, qui rendait compte régulièrement à l’attaché militaire US à Bruxelles pour le compte (du moins en général) des autorités belges, a mis en place une quinzaine de groupes stay-behind en Belgique, placés ensuite sous la responsabilité du SDRA-8. L’un des premiers faits marquants de ce réseau est l’assassinat d’un leader communiste très populaire, Julien Lahaut.

Et en 1949 –année de la création de l’OTAN[5], le chef des renseignements britanniques écrivait au 1er ministre Belge Paul-Henri Spaak (pilier du Bilderberg dès ses débuts) au sujet de la poursuite de « la coopération belgo-britannique entre les services spéciaux » avec comme objectif d’échanger des informations sur les « ennemis » (les communistes) et de préparer des « organisations appropriées de renseignement et d’action » [6]. Mais les belges voulaient absolument traiter aussi avec les US et Spaak leur a demandé de se mettre d’accord entre eux sur une collaboration à 3.

Un Tripartite Meeting a rapidement été mis en place sous le nom de Comité Clandestin de l’Union Occidentale (CCUO), qui existe toujours. Et Spaak a été récompensé de ses bons et loyaux services par une nomination au poste de secrétaire général de l’OTAN en 1957.

La France, puis les Pays-Bas et le Luxembourg ont rejoint le CCUO dans les mois suivants et l’OTAN en a pris la direction en 1951 devenant le Coordination and Planning Committee puis l’Allied Coordination Committee (ACC) en 1958 quand les US ont rejoint les 5 autres (l’Allemagne, l’Italie, le Danemark et la Norvège sont arrivés les années suivantes). La dernière réunion de l’ACC a eu lieu pas plus tard que les 23 et 24 octobre 1990, quinze jours avant les révélations d’Andreotti au Parlement italien.

En 1952 le 1er ministre Van Houtte a réclamé que le gouvernement soit mis au courant des informations récoltées sur le territoire, des actions de sabotage économique ou de « la mise en action de l’armée secrète », et mener « de manière autonome » ce qu’il qualifie de « guerre psychologique » [7]. Cela n’allait donc pas de soi pour les US.

Les renseignements civils, la Sûreté de l’Etat (plus spécifiquement une cellule appelée STC/Mob), ont d’abord recruté beaucoup d’agents de l’armée clandestine hors de leurs rangs, avant de changer de braquet en 1968. Ses missions concernant le Gladio ne sont pas très claires : il y avait l’action en cas d’occupation, mais aussi un volet renseignement et actions psychologiques qui aurait officiellement été abandonné à la fin des années 60. Mais on peut en douter.

Le volet militaire (appelé SDRA 8[8]), placé sous l’autorité du Service Général du Renseignement de l’armée, était en lien direct avec l’OTAN et le gouvernement belge. A l’origine il devait gérer les réseaux d’exfiltration et les actions de sabotage, d’après le rapport du Sénat. Dans les années 70, les agents des renseignements militaires qui étaient généralement des paracommandos et monarchistes, se seraient mis à recruter des non militaires « dans tous les milieux et dans toutes les professions« . Les agents étaient formés en Grande-Bretagne, ou bien des instructeurs anglais venaient les former en Belgique, jusqu’à ce que les belges cessent les missions de sabotage pour les laisser aux US, toujours dans les années 70.

Certains membres des renseignements militaires belges (le SDRA 8) étaient aussi formés aux Etats-Unis et collaboraient « régulièrement » avec les Forces Spéciales US. Leur pro-américanisme était d’ailleurs un des critères de recrutement, à la hauteur de l’anticommunisme.

Le Gladio belge était équipé du même système radio qu’en Suisse, en Italie et ailleurs : le système Harpoon qui permettait un cryptage de haut niveau. Comme en France, les cellules locales étaient très cloisonnées, chaque agent ne connaissant que les quelques membres de sa propre cellule.

Quant aux noms des agents, ils n’étaient connus que de très peu de responsables et les listes étaient déposées à Washington[9]. « On disait aux agents qu’ils faisaient partie d’une organisation européenne dans les bases se situaient à Londres et à Washington. La structure complète de l’organisation n’était pas divulguée », précise le rapport sénatorial.

Des exercices avaient lieu aussi bien en Belgique notamment avec des agents étrangers, anglais ou US, dont certaines ressemblaient à des attaques de barbouzes, qu’en dehors du territoire national.

On citera par exemple l’attaque de la caserne de gendarmerie de Vielsalm en 1984 alors que comme par hasard un exercice similaire était en cours dans le même secteur avec des membres belges du stay-behind et des militaires US des Forces Spéciales entraînés à la guerre non conventionnelle sur la base de l’armée US de Fort Bragg.

En effet, chaque année avaient lieu des « exercices Oesling »dans le cadre de l’OTAN –et du stay-behind. Des caches d’armes et de munitions ont aussi été disséminées un peu partout.

Plusieurs 1er ministres ou ministres de la défense des années 80 ont dit ignorer l’existence de ces branches spéciales des renseignements civils et militaires, alors que selon les responsables de ces services ils étaient informés régulièrement de son activité.

Une des premières manifestations du Gladio Belge a eu lieu lors à la suite de la crise de la « question royale » après la guerre : la droite voulait le retour du Roi, la gauche voulait la République[10], avec un point culminant en 1950 quand le Roi Baudouin a prêté serment. Le 18 août 1950, le leader communiste Julien Lahaut a été abattu devant chez lui dans la soirée par deux types qui ont sonné à sa porte. L’affaire a été conclue par un non-lieu en 1972.

Il a fallu attendre 2015 pour avoir la confirmation quasi officielle que l’armée stay-behind était derrière cet assassinat. « Julien Lahaut assassiné par un réseau soutenu par l’Etat belge« , titrait la RTBF en mai 2015. Cette affirmation était la conclusion des recherches menées par des historiens aidés par une souscription publique et quelques subsides, pas par la justice ni par la police, ni par l’Etat évidemment.

« L’attentat a été commandité au sein du réseau anticommuniste d’André Moyen, soutenu par le patronat de grandes entreprises et bénéficiant de soutiens policiers et à la Sûreté de l’Etat » car Lahaut, un homme vraiment intègre et très apprécié à gauche, défendait la République (et de fait la monarchie avait été lamentable durant la guerre).

Ce sont en effet des agents du réseau de Moyen qui ont assassiné Lahaut, officiellement par excès de zèle [11]. L’assassin serait François Goossens, qui dès 1950 se vantait même du meurtre mais se savait intouchable et n‘a donc jamais été arrêté. L’équipe était composée de partisans de l’extrême droite flamande : outre Goossens, Jan Hamelrijck, et les frères Alex et Eugène Devillé, tous parfaitement connus de la police et de la justice.

André Moyen[12] a comme on l’a vu déclaré publiquement avoir été à la tête du réseau anticommuniste belge [13]. Ledit réseau était soutenu financièrement par la finance Belge et notamment la Société Générale qui contrôlait alors un tiers de l’économie belge, ainsi que par les grandes entreprises (Union minière filiale de la Société Générale, Brufina le bras financier de la Banque de Bruxelles devenu ING…)[14], par la Sûreté de l’Etat et par la justice : « il existait une collusion entre le réseau d’André Moyen et la police judiciaire de Liège, Bruxelles et Anvers qui a empêché le juge d’instruction de Liège d’aboutir dans son enquête », explique l’un des historiens qui ont mené les recherches.

Tout cela a permis de clore l’enquête sur la mort de Julien Lahaut par un non-lieu en 1972. C’est après cela qu’André Moyen a commencé à parler de quelques détails relatifs à cette affaire. Mais il est resté protégé car sinon c’est tout le réseau stay-behind qui risquait d’être mis à jour.

La Brufina a également rémunéré Moyen –et ses hommes – pour surveiller des employés. Ca faisait quelques rentrées d’argent dont Moyen pouvait disposer sans contrôle. Mais pour les US, ses infos étaient souvent exagérées voire sensationnalistes, comme quand il a affirmé que l’URSS avait fait des largages d’armes en Belgique à l’été 1948 alors que c’était complètement faux.

Après 1950, André Moyen a continué ses basses œuvres, grâce aux contrats avec les grandes entreprises, notamment via l’entreprise de sécurité privée G4S[15], toujours active. En contact avec les US depuis la fin de la guerre, il a rencontré Irving Brown via son agent traitant le colonel René Solborg, lui-même très proche des milieux d’extrême droite français et leader d’un groupuscule appelé la « Fraternité mondiale » créée en 1950 à Paris depuis le siège de l’UNESCO [16].

En parallèle, il était aussi en contact avec les responsables français, suisses et italiens du stay-behind. Dès 1949, le ministre de l’Intérieur le baron Albert De Vleeschauwer l’a mis en contact avec Jules Moch, ministre français de l’Intérieur, et Mario Scelba le ministre de l’Intérieur italien[17]. Il était aussi en lien avec les militaires, de l’Allemagne à l’Espagne en plus de la CIA, selon plusieurs observateurs.

On l’a aussi retrouvé dans l’officine anticommuniste « Paix et Liberté », qui avait des succursales dans plusieurs pays d’Europe, dont la France et l’Italie.

Un des collègues de Moyen, Emile Delcourt, autre fervent anticommuniste et ex-résistant, a lui aussi créé son propre réseau privé, dont l’objectif était « l’élimination des agents communistes de Belgique et la protection de l’industrie belge contre des possibles sabotages ou des grèves d’inspiration communiste », c’est-à-dire en fait l’ensemble des mouvements de contestation[18]. Là encore, les financements provenaient de l’Union Minière du Haut-Katanga (filiale de la Société Générale) et de la Banque de Bruxelles (Brufina). Pas de chance, les soviétiques avaient réussi à infiltrer le réseau de Delcourt.

Un paquet de structures officieuses ont été créées pour gérer et organiser le réseau stay-behind belge. En parallèle du système stay-behind officiel, un groupe appelé Catena pour « Comité anti-terroriste nord-africain », visait à empêcher l’indépendance des colonies Africaines de la France et de la Belgique notamment.

On retrouvait dans ce groupe piloté par un ancien colonel de l’armée française, Michel Mercier des types du stay-behind et des renseignements belges occupés à traquer les militants indépendantistes jusqu’en Europe. La Catena était d’ailleurs très similaire à la Main Rouge : mêmes objectifs, mêmes méthodes, mêmes recrues. Des attentats contre des sympathisants de l’indépendance de l’Algérie ont eu lieu en Belgique dans les années 50.

La Catena était en lien avec des groupes similaires dans toute l’Europe, faisant partie d’une sorte d’Internationale fasciste, et a notamment contribué à exfiltrer des fascistes – terroristes italiens.

Il y avait aussi la succursale belge de « Paix et Liberté » créée en 1951, avec comme d’habitude de l’argent de la Brufina et de la Société Générale, et Marcel De Roover, nommé directeur de la Brufina (filiale de la Banque de Bruxelles) en 1941 et proche des milieux financiers aussi bien que de l’extrême droite belge en était l’un des piliers. Beaucoup de ses membres étaient aussi agents des renseignements et autres barbouzes.

Quant à De Roover, on le retrouve comme intermédiaire dans le financement de plusieurs groupuscules anticommunistes, voire carrément fascistes comme la Légion nationale de l’avocat d’affaires Paul Hoornaert, grand admirateur de Mussolini [19].

La stratégie de la tension en Belgique: les années de plomb

A partir de 1970, le stay-behind belge a davantage misé sur le renseignement, et a commencé à recruter des agents dans des structures vitales pour le pays, comme les transports, les télécoms, l’énergie… Il recrutait plutôt des gens dont la présence serait pérenne dans l’entreprise, donc pas des cadres dirigeants mais plutôt des ingénieurs, qui avaient accès à des informations importantes. Ces agents rapportaient au service un tas d’informations stratégiques sur leurs entreprises et leur secteur d’activité [20].

L’Ennemi affiché pour les US était donc « le communisme » au sens le plus large. Le rapport de la commission d’enquête belge sur les magouilles US du stay-behind mentionne un document rédigé par le général Westmoreland, chef d’état-major de l’armée US, en mars 1970.

Cette note précisait les intentions des US dans les pays colonisés après-guerre envers les groupes et mouvements qui n’allaient pas dans le sens de leurs intérêts, et préconisait d’avoir des agents dans les services de renseignements des pays hôtes, de mener des actions – y compris violentes – contre les communistes avec ou sans l’accord des autorités locales, ou encore d’infiltrer ces groupes pour les pousser à faire n’importe quoi : « les services de renseignements de l’armée US chercheront à pénétrer le milieu des insurgés au moyen d’agents en mission spéciale avec pour tâche de former des groupes d’action spéciale parmi les éléments les plus radicaux de la rébellion« , afin que ces groupes « agissant sous le contrôle du service de renseignements de l’armée US » mènent des « actions violentes et non violentes en fonction de la nature du cas« .

La note Westmoreland préconisait également des interventions directes dans des pays « amis » jugés trop timides dans leurs actions anticommunistes, de manière, comme le résume le sénat belge en 1991, à « convaincre leurs gouvernements et leurs opinions publiques des réalités du danger et de l’impérieuse nécessité d’un sursaut ».

Ces opérations selon Westmoreland devaient bien-sûr être dirigées par l’armée US, avec comme hommes de main « les éléments les plus radicaux de la rébellion« .

En 1974, la Belgique, bon élève du stay-behind, a donc mis en place le Public Information Office (PIO), là encore avec une branche militaire et une branche civile. Créé en tant que structure publique[21] par le ministre de la Défense Paul Vanden Boyenants[22], il avait pour objectif de mener une propagande anticommuniste et anti anti militaritiste dans les forces armées et à l’extérieur, à travers le recrutement de conférenciers dont certains avaient été formés au Centre psychologique militaire, et qui étaient proches de journalistes pour les intoxiquer quand il le fallait ou propager la bonne parole par leur canal.

Mais la branche militaire du PIO s’est rapidement dotée d’un groupe d’action pour l’activisme politique et le renseignement, de 445 militaires et officiers de réserve : « sabotage organisé de conférences, infiltration et utilisation d’associations et de groupes que l’on estimait a priori favorables aux thèses de l’armée » et anticommunistes tels que « le NEM Club, le CEPIC [Centre des indépendants], mais aussi la Confrérie des Hospitaliers de Notre-Dame d’Aulne, l’Ordre souverain et militaire du Temple de Jérusalem, la milice de Jésus Christ« , raconte le rapport du sénat.

Il s’agit de groupuscules d’extrême droite et atlantistes, plus ou moins politiques, qui recrutaient dans les milieux politiques, et de pseudo groupuscules templiers, très prisés des services US, tous très présents dans la région de Charleroi. Les membres du PIO étaient présents dans ces ordres, de même que des militaires responsables du stay-behind et / ou des renseignements. La même configuration qu’en France en plus concentré.

L’objectif était de faire de l’entrisme et de manipuler ces groupes pour qu’ils aillent dans le sens voulu. En plus de ces activités, le PIO, dont la direction a été confiée au major Jean Bougerol [23], a développé une compétence en matière de propagande et de renseignement, et son influence rayonnait dans les milieux d’extrême-droite. Cependant, les infos sont incomplètes au sujet du PIO car la Sûreté Belge a refusé de donner les noms de ses membres et de préciser certaines actions du PIO.

Bougerol, accusé par certains d’avoir été « le cerveau » des tueries du Brabant, fournissait aussi des articles tout prêts à un quotidien francophone, La Dernière Heure, sous le nom de « Miller », qui était aussi le nom d’un obscur réseau « antisubversion » qu’il avait monté en 1979.

L’une de ces revues était « Inforep », dirigé par l’épouse d’un officier de réserve anticommuniste, qui était une des journalistes de l’agence de presse Chine-Libre, travaillait pour une revue européenne ainsi que pour le quotidien La Dernière Heure à la fin des années 70[24].

Bougerol s’apprêtait même à créer sa propre agence de presse, certainement sur le modèle d’Aginter Press au Portugal, à la fin des années 70. Et il voyageait beaucoup à cette époque : Liban, Taïwan, Irland, Espagne, Italie, Pays-Bas, Allemagne, France…

En avril 1991, la revue Libertés expliquait que « En 1978, une vingtaine de journalistes professionnels, officiers de réserve par ailleurs, ont été affectés au « Public Information Office »« . René Haquin qui était l’une des grandes plumes d’un quotidien national francophone dit « de référence », Le Soir, était par exemple lieutenant de réserve. Evidemment, on a beaucoup minimisé cette dépendance de ces « journalistes » vis-à-vis des autorités militaires.

Les activités occultes du PIO étaient d’abord financées par de l’argent public puis par des entreprises comme la SA Promotion et Distributions Générales (PDG) contrôlée par le baron de Bonvoisin (proche de Vanden Boyenants) via un prête-nom, ce qui a donné lieu à quelques scandales politico financiers en parallèle. En 1978, le ministre de la défense, dont on reparlera plus tard, Van den Boyenants, a décidé de couvrir toutes les magouilles du PIO et de financer ses activités avec son ministère[25].

Quant au CEPIC (Centre politique des indépendants et cadres chrétiens), créé et dirigé par Vanden Boeynants jusqu’à sa dissolution en 1982, il constituait un micro parti à la droite du PSC, le parti chrétien. Parmi les membres il y avait Bonvoisin ou Jean-Pierre Grafé, tous deux cités comme pédos dans le dossier Dutroux, ou l’avocat Jean-Paul Dumont lui aussi cité dans le dossier.

En 1978, c’est par exemple un membre du CEPIC et intime de Vanden Boeynants, Joseph Michel, qui a permis à Nihoul de sortir de prison plus rapidement que prévu. Le même Michel a éliminé de l’instruction de l’affaire Dutroux le juge Connerotte, qui commençait à gratter trop près du pouvoir politique, et à encadrer les recherches de son successeur le juge Langlois. On va revenir sur tout cela plus tard.

Le CEPIC était en lien avec duvers groupuscules d’extrême-droite, et plusieurs de ses membres ont été assassinés lors des massacres du Brabant au début des années 80, comme:

  • les deux gérants d’un sex shop impliqués dans l’organisation de partouzes pédocriminelles,
  • Léon Finné une des victimes de l’attaque d’Overijse,
  • Le patron de l’auberge Aux Trois Canards où le gratin local allait se restaurer, notamment des proches de Vanden Boeynants impliqués dans le réseau. Jacques Van Camp, le propriétaire des Trois Canards lieu de l’attaque du 2 octobre 1982, a eu une altercation avec deux des tueurs sur le parking après la fermeture, juste avant le braquage de l’établissement. Il a finalement pris une balle dans la tête lors de la fuite des types.

Le sabotage était un autre grand domaine d’action du stay-behind, apparemment à comprendre au sens large. Comme dans les autres pays concernés, des caches d’armes ont été installées un peu partout dans le pays, de l’équipement a été fourni par les US et les anglais, et des exercices militaires ont été menés conjointement sur le sol belge et aussi à l’international, dans la clandestinité. Parmi ces exercices, il y avait des exfiltrations d’un pays à l’autre en toute discrétion.

En 1984, un de ces exercices appelés « Oesling 84 »  avait un volet consistant à parachuter en Belgique un escadron des Forces Spéciales US en Belgique, dont l’objectif était d’attaquer la caserne militaire Sergent Ratz à Vielsalm et d’y voler des armes avec des paracommandos belges. Les US ont tiré sur les militaires : « Barbelés cisaillés, milicien ligoté, barreaux de l’armurerie sciés, double vitrage découpé au diamant, dépôt dévalisé: 20 fusils automatiques légers (Fal), des mitraillettes Vigneron et trois vieux Lee Ensfield. L’adjudant de garde, M. Freches, dégaîna (son arme n’était pas chargée) et fut abattu d’une rafale (quatre balles dans le corps). Il survécut« , racontait Le Soir en 1990. En fait, ce militaire a été abattu par une première rafale, puis un type est venu l’achever de trois balles supplémentaires et il n’a survécu que par miracle.

L’objectif était de faire flipper la police et de l’amener à réagir, tout en faisant croire à la population que la menace « Rouge » était réelle : des armes volées lors de cette opération ont été ensuite planquées dans un squat de Bruxelles utilisé par un groupe communiste/ révolutionnaire (les CCC les Cellules Communistes Combattantes). Les autorités ont évidemment nié toute implication d’un groupe armé officiel dans cette affaire, pointant du doigt des éterroristesé.

Puis, on a appris que lesdites CCC, auxquels on a imputé par moins de 27 attentats en 1984 et 1985 contre divers « symboles » du capitalisme, étaient en réalité une création de l’extrême droite.

Mais ces attentats bidons ont quand-même servi de prétexte à un vaste coup de filet contre les militants de gauche, discréditant les communistes en Belgique : « La Sûreté de l’État et très certainement la gendarmerie profitèrent des événements pour investir 120 immeubles de mouvements pacifistes, gauchistes et tiers-mondistes, pour saisir un grand nombre de publications et des listes d’adresses et de numéros de téléphone, et pour interroger des leaders de la gauche au cours d’une opération appelée ‘opération mammouth’. Était-ce là la raison du délai mis pour arrêter les auteurs ? Parallèlement, les services de renseignement intensifièrent les contacts avec leurs homologues étrangers », écrit Lode Van Outreve dans son article sur « Les services de renseignements et de sécurité« .

Cela, « jusqu’à ce que des journalistes découvrent que le réseau terroriste bâti par Pierre Carette au début des années 1980 était en fait composé d’agents proches de l’extrême droite. Le bras droit de Carette, Marc de Laever, rejoignit d’ailleurs par la suite un mouvement néo-nazi allemand », écrit Daniele Ganser.

Selon les déclarations en octobre 1985 d’un membre belge du commando nommé Lucien Dislaire seul inculpé dans l’affaire avant d’obtenir un non-lieu, l’opération était pilotée par un état-major en Grande-Bretagne et relayé par un QG au Luxembourg et deux cellules de contact en Belgique[26].

L’opération Oesling 84 était donc importante, et depuis le début du mois d’octobre 1984 plusieurs attaques du même genre ont été recensées, notamment :

  • Attaque à la grenade de la gendarmerie de Neufchâteau en pleine nuit, sans que les gendarmes ne soient prévenus,
  • Attaque contre la gendarmerie de Longlier,
  • Attaque contre un dépôt de carburants à Bastogne,
  • Sabotage du relais RTBF (radio été télé publique belge), dans la forêt d’Anlier.

Mais après le scandale de la caserne de Vielsalm, l’exercice a tourné court et les US auraient été renvoyés. outre-Atlantique.

Un autre attentat qui a eu lieu en juillet 1981 dans un journal de gauche, Pour, très critique envers l’extrême-droite et les services de renseignement. Lode Van Outrive écrit que le journal « avait été infiltré par des agents de la Sûreté de l’État, soupçonnés d’avoir collaboré avec des personnes d’extrême droite pour allumer l’incendie ».

De leur côté, les CCC ont été accusées d’avoir commis 21 attentats en 1984 et 1985, au cours d’un procès qui pour le coup a eu lieu rapidement, dès 1988. Notamment avec des explosifs militaires et des armes volées par l’armée dans des casernes militaires, donc. Ces attaques visaient en général des symboles capitalistes comme le siège de la Fédération des Entreprises de Belgique attaqué le 1er mai 1985, des sites militaires, des institutions. Quatre militants ont été condamnés à la perpétuité, deux ont été libérés en 2000 les autres en 2004.

En juin 1990 encore, une armurerie militaire était attaquée à Marche-en-Famenne par 4 ou 5 types armés qui ont embarqué 13 flingues, 3 mitrailleuses et un millier de munitions.

A cette époque, la Belgique était sous tension maximale, avec la vague d’attaques meurtrières contre des supermarchés, une bijouterie, une armurerie, un resto notamment, appelée « les tueries du Brabant », sur laquelle on va revenir.

Et puis en juillet 1991 il y a eu l’assassinat du leader du parti socialiste dans les années 80 André Cools. Deux Tunisiens qui travaillaient pour la mafia sicilienne ont d’abord été condamnés en 1998, puis l’ancien chauffeur et l’ancien secrétaire particulier de Cools ont été condamnés à 20 ans en 2004 pour avoir commandité le crime.

Le chauffeur a avoué avoir recruté les deux Tunisiens à la demande d’un mafieux de Liège, Cosimo Solazzo, et par l’intermédiaire d’un mafieux sicilien. Un ponte socialiste proche de Cools, André Van der Biest, a aussi été écroué pour avoir commandité l’assassinat, mais il s’est suicidé en 2002 en clamant son innocence.

Lors de l’enquête sur le meurtre, il est apparu que Cools avait touché 10 millions de dollars de commissions dans le cadre de la vente de 24 hélicoptères Agusta à l’armée belge. Mais il s’agissait de faux billets et Cools menaçait de parler de l’affaire publiquement. Cependant il n’était pas le seul à avoir touché de l’argent : plusieurs politiciens de premier plan du parti socialiste belge ont eu des condamnations mineures en 1998 dans le cadre de ce dossier.

Et il n’a certainement pas touché de l’argent qu’en provenance de l’affaire Agusta puisqu’à sa mort cet homme issu des milieux ouvriers était en possession de l’équivalent de 60 millions de dollars de l’époque.

A cette époque, la Belgique vendait des armes à n’importe quel pays, y compris ceux qui étaient sous embargo comme l’Iran.

L’extrême-droite belge, câlinée par l’OTAN

En Belgique non plus, l’épuration d’après-guerre n’a pas été menée avec grand acharnement. Beaucoup de nazis et collabos ont pu fuir, d’autres, plus nombreux, se sont acheté des certificats de virginité ou plutôt de « résistance ».

Parmi les nazis belges les plus connus, Léon Degrelle, ancien SS, a pu fuir son pays sans trop difficulté en 1944 pour se réfugier en Espagne alors sous régime franquiste. Lui qui avait déjà été pressenti dans les années 30 pour devenir 1er ministre de la Belgique à l’occasion d’un virage fasciste, a proposé aux US son aide pour former les troupes anticommunistes et donner ses infos sur les communistes, et a effectivement collaboré avec les services US lorsqu’il était en Espagne où il vivait sous le nom de Juan Sanchez et écrivait des livres sur la guerre sous divers pseudonymes. Il y était protégé des tentatives de le faire extrader ou même de le kidnapper pour le faire comparaître devant un tribunal.

En Espagne, Degrelle a fréquenté l’ancien SS Otto Skorzeny, passé du côté de la CIA et du Mossad, qui fut même témoin au mariage de la fille cadette de Degrelle au début des années 70 et rédigé la préface de son bouquin « Mémoires d’un fasciste ». Il y était bien protégé : en 1961 un groupe a tenté d’enlever Degrelle pour le ramener en Belgique afin qu’il soit jugé, mais il a été intercepté par la police franquiste. On le soupçonne d’avoir travaillé pour le stay-behind américain en montant son propre groupe paramilitaire.

En parallèle du développement du réseau Gladio en Belgique, une ribambelle de groupes politiques d’extrême droite, mais pro européens et pro américains, ont été créés.

Dès 1949, un Front National Belge de l’Indépendance (FNBI) est créé par un anticommuniste pour contrer le poids des communistes dans les anciens combattants au moment de la crise de la « Question royale ». Emile Delcourt, le fondateur de cette « association de résistants », était aussi membre de « Paix et Liberté », et a balancé André Moyen comme l’un des assassins du leader communiste Julien Lahaut avec deux autres membres de « Paix et Liberté », quand en 1958 il a été poursuivi pour avoir détourné de l’argent du Fonds du Cardinal Mercier (ce qui n’a pas empêché, comme on l’a vu, un non-lieu rendu en 1972). Son FNBI a réussi en très peu de temps à parler au nom de la totalité des anciens résistants, malgré de nombreux clivages et divergences avec les groupes de gauches ou plus modérés.

A côté de son groupuscule, Delcourt avait aussi créé son petit réseau de renseignement –anticommuniste évidemment- dont l’objectif était « l‘élimination des agents communistes de Belgique et la protection de l’industrie belge contre des possibles sabotages ou des grèves d’inspiration communiste »[27], là encore avec des financement de la Société Générale via sa filiale l’Union minière du Haut Katanga (dont la banque Lazard était un des principaux actionnaires et qui était pendant longtemps le premier producteur mondial de zinc, cuivre, cobalt, uranium notamment) et la Brufina, via Marcel De Roover, membre de « Paix et Liberté » et représentant belge au meeting de la World Anti Communist League à partir de 1966.

En 1961, De Roover a créé une antenne belge du Centre Européen de Documentation et d’Information (CEDI), avec de l’argent en provenance de l’Espagne franquiste. Le premier président du CEDI n’était autre qu’Otto von Habsbourg, héritier de la famille royale d’Autriche et lobbyiste de l’Europe dès les années 20.

Créé en 1952 par des allemands catholiques d’ultra droite et des franquistes espagnols, le CEDI était surnommé « l’Internationale des Conservateurs », et l’un de ses piliers, Richard Jaeger qui fut vice-président du Bundestag a déclaré en 1973 : « Notre but est l’unification de toute l’Europe, libérée du communisme ».

Le CEDI, qui avait des sympathisants en Belgique, au Portugal, au Royaume-Uni, en Finlande, en France[28], était évidemment en lien avec d’autres structures d’extrême-droite pro-européennes comme Le Cercle dont on va reparler, ou le Comité international de défense de la civilisation chrétienne (CIDCC), qui sont des sortes de forums transnationaux plutôt élitistes et discrets d’échanges, de rencontres et de diffusion de mots d’ordre.

De Roover était évidemment très proche des renseignements militaires belges et il a contribué au financement de réseaux anticommunistes privés tels que Milpol d’André Moyen.Delcourt a aussi créé au Luxembourg l’AECD, qui récupérait de l’argent en provenance des Etats-Unis.

On citera par exemple le Cercle des Nations, créé en 1969, au comité d’honneur duquel on trouve d’éminents politiciens et aristos comme le prince Albert de Croy, Charles de Pauw, Paul Vanden Boeynants ou le prince Antoine de Ligne. Il y avait aussi le CEPIC, qui était l’aile droite du parti chrétien, le PSC, dirigée par Vanden Boeynants.

Moins orthodoxes encore, les groupes d’extrême droite fleurissaient aussi, par exemple :

  • Westland New Post (WNP), créé en 1979 et piloté par un nazi et réserviste de l’armée belge d’une trentaine d’années, Paul Latinus, réfugié un temps en Espagne franquiste. Latinus y avait fait entrer un ex SS vaguement condamné à la Libération, Karl de Lombaerde, qui disait travailler pour la DIA (Defense Intelligence Agency) et était en charge de la formation idéologique et pratique des jeunes adeptes, assurant la continuité du délire nazi aux délires néo nazi et néo fasciste. De Lombaerde, ex membre de la SS devenu major dans la Luftwaffe, était un fan de rites initiatiques et des délires templiers version allemande, les chevaliers teutoniques. Parmi les dirigeants du WNP il y avait aussi le militaire souvent évoqué dans l’affaire des tueries du Brabant comme l’un des terroristes, Michel Libert, selon lequel Vanden Boeynants était « un dirigeant » de WNP.

Au lieu de coller des affiches, les recrues apprenaient la filature, la collecte d’informations, les « ratonnades », avaient un entraînement professionnel grâce à des gradés de la police et des militaires présents dans le WNP, et ils avaient même des cartes de crédit au nom de la structure.

L’argent ne manquait pas, a expliqué Latinus, parce qu’il travaillait pour les services de renseignements US qui lui auraient demandé de créer et développer un mouvement d’extrême-droite devant se faire une réputation par la violence et le terrorisme, cela dans un but soi-disant anticommuniste[29]. Mais l’argent du WNP venait aussi de beaucoup plus près.

Par exemple d’une sorte d’agence surnommée Burafex pour « Bureau des affaires extérieures » qui était un groupe de patrons de grosses entreprises et d’aristocrates belges principalement, finançant des actions et structures qui allaient dans leur sens. De l’argent venait aussi de la DINA (la police politique de Pinochet).

  • Le centre d’études et de recherches « socio-biologiques et raciales », créé en 1984 par Michel Libert ainsi que des membres du groupe e groupe Défense de l’Europe, de ses libertés, de son travail et de son autonomie-Delta
  • Le mouvement social nationaliste créé en 1982.
  • L’équipe autour de Nouvelle Europe Magazine avec ses « NEM Clubs » soutenus par l’OTAN, qui organisaient des conférences anticommunistes destinées à effrayer le chaland, et dont l’un des adminsitrateurs était le baron de Bonvoisin,
  • La bande d’Ordre Nouveau Belgique, créé en 1971,
  • Jeune Europe de Jean Thiriart un proche de Luc Jouret gourou du Temple Solaire (dont on va reparler). Jeune Europe était construit comme un mouvement militaire avec des cellules de 6 membres rattarchées à des zones et des régions. Le groupe pouvait intervenir à l’étranger et avait apparemment des ramifications en France.
  • Le Parti Européen créé en 1972,
  • Le mouvement rexiste (nazi),
  • Le Zwarte Orde-Ordre Noir : également appelé ZOON, qui regroupait des nazis souvent membres du WNP comme De Lombaerde. Le groupe commettait des attentats contre les immigrés et menaçait ceux qui les défendaient.
  • Les compagnons du Christ Graal créés par Michel Libert.

  • Le Front de la Jeunesse créé en 1973 qui a incendié les locaux d’un journal de gauche, Pour,
  • Le Parti des Forces Nouvelles
  • L’association Yggdrasil, en réalité un groupe nazi aux relents ésotériques pseudo druidiques, proche du WNP. Le groupe d’environ 700 membres, actif dans les années 80, a été fréquenté par Paul Latinus. Des réunions avaient lieu dans des bois, des voyages étaient organisés à Stonehhenge, et l’organisation était « en lien avec d’autres sociétés ésotériques, Thule en Suisse, Orion en Irlande, Irmin en France, Artgemeinschaft en Allemagne » selon des documents de l’époque consultés par la presse belge.
  • Le groupe Etudes, Recherches et Orientations européennes et ses grosses réunion de la « Nouvelle Droite » que fréquentaient Karl de Lombaerde, Michel Libert et Paul Latinus.
  • Le Cercle des Nations où se croisaient cathos extrémistes, fascistes, financiers et aristos de de droite extrême. Ledit cercle a par exemple soutenu les colonels grecs, mis en place par l’OTAN via un coup d’Etat qui a duré jusqu’en 1986. Parmi ses membres il y avait le vendeur d’armes Roger Boas, le duo Bonvoisin- Van den Boeynants ou Philippe Cryns, entrepreneur et organisateur de partouzes auxquelles des adolescents étaient conviés.
  • Le CEPIC (Centre politique des indépendants et cadres chrétiens) a été créé en 1972 par Vanden Boeynants, comme un mouvement à droite du parti chrétien. Son trésorier était le baron de Bonvoisin qui dirigeait l’organe médiatique du mouvement, « Nouvelle Europe Magazine » (NEM, avec ses clubs de ‘lecteurs’), et finançait de nombreuses activités liées à l’extrême droite, comme le Front de la Jeunesse. Il était aussi membre de l’Opus Dei, et en lien avec Jean Violet, cet avocat d’extrême droite membre du Cercle Pinay, où Bonvoisin a fait une visite au moins une fois en 1982″, selon une note de la Sûreté de l’Etat publiée par le journal flamand De Morgen le 19 mai 1981. Bonvoisin a joué un rôle important dans l’installation de missiles nucléaires US sur des bases militaires US en Belgique, pays soi-disant « neutre », dans les années 60. Officiellement, ils étaient installés pour faire face à une attaque de missiles soviétiques, alors qu’il s’agissait aussi de missiles d’attaque. Bonvoisin avait aussi de très bons contacts avec le patron des services de renseignements français, Alexandre De Marenches.

C’est surtout dans les années 60 que les mouvements d’extrême droite belges se sont développés, revendiquant tous un « Etat fort » proche de la dictature et foncièrement anti communistes.

En 1960, quand a lieu la décolonisation du Congo, devenu le Zaïre, des groupes anti décolonisation ont été créés comme le Comité d’Action et de Défense des Belges d’Afrique devenu le Mouvement d’Action Civique. Le Comité avait pour base un café d’Etterbeek, une commune bruxelloise qui a aussi été un haut lieu des activités pédocriminelles de la bande Nihoul et consorts, et où les anciens coloniaux se retrouvaient pour partager leur aigreur et militer.

 

Officiellement, ce groupe était contre l’ONU et l’OTAN, mais il militait ardemment pour l’intégration européenne. Assez vite, il a été question de recruter de nouveaux adeptes et d’entraîner les militants au combat. Le Mouvement d’Action Civique s’est ensuite dissous dans Jeune Europe, créé en 1962 par Jean Thiriart dans la veine brun rouge, c’est-à-dire le fascisme teinté de communisme pour l’aspect dirigiste du communisme. Thiriart a commencé en politique dans le socialisme puis a milité des sa création en 1939 dans l’association Les Amis du Grand Reich Allemand[30].

Cofondateur du  Comité d’Action et de Défense des Belges d’Afrique où il a rencontré Luc Jouret qui deviendra l’und es gourous du Temple Solaire et a rejoint le micro parti « nazi maoïste » de Thiriairt. Tout comme Léon Degrelle, Thiriat était aussi un proche d’Otto Skorzeny. Malgré tout cela, il se revendiquait ni de droite, ni de gauche. A la fin de la guerre, en 47, il a pris 3 ans de prison pour « avoir servi la politique et le desseins de l’ennemi, pour dénonciation, détention et port d’arme à feu« . Pas cher payé.

En 1960 il a rejoint le Comité d’Action et de Défense des Belges d’Afrique devenu le Mouvement d’Action Civique (MAC) et s’est rapproché de l’OAS qui militait pour l’Algérie française. Jeune Europe était un mouvement pro-Européen qui croyait à une race européenne et visait à constituer un vaste mouvement européen. Il avait des filiales dans plusieurs pays : Autriche, Allemagne, Espagne, Angleterre, Italie, Pays-Bas, Portugal, Suisse. Jeune Europe s’affichait comme anti US et s’est rapproché de mouvements indépendantistes arabes.

Le Front de la jeunesse était un peu comme Occident chez nous : il regroupait des jeunes types de bonne famille et néonazis, souvent déjà engagés dans d’autres mouvements de fachos comme les NEM clubs.

Ce « Front » a été a été créé dans la partie francophone de la Belgique, avec le soutien actif de Nouvelle Europe Magazine qui cherchait à créer un grand parti facho sous l’égide du CEPIC de Vanden Boeynants, lié au parti chrétien. Il était dirigé par un collabo et membre de l’institut politique de la SS, Emile Lecerf, qui a rejoint Jeune Europe de Jean Thiriart.

Outre des attentats et actions violentes contre des communistes, le Front de la jeunesse a traqué des opposants à Mobutu, dictateur zaïrois protégé par la Belgique. Après la condamnation de plusieurs membres suite à des attentats et au meurtre d’un maghrébin, le groupe a été dissous en 1981. Un leader historique du parti flamand d’extrême droite Vlaams Belang, Philip Dewinter, était issu de la branche flamande du Front de la Jeunesse. Des cadres du Front National belge venaient aussi du Front de la Jeunesse, comme Patrick Cocriamont et son bras droit Daniel Leskens.

Vanden Boyenants, ministre des Affaires étrangères, était impliqué dans le développement de Westland New Post et dans sa protection, surtout quand les enquêtes sur les tueries du Brabant ont commencé à porter sur le rôle de cette organisation.

Pilier parti chrétien, Vanden Boyenants était aussi administrateur de différentes sociétés, comme la multinationale Philips. Il grenouillait beaucoup dans les milieux affairistes, et fréquentait le gratin du business belge. Parmi ses grands amis, il y avait les héritiers Solvay, le promoteur immobilier Charly De Pauw qui a construit plusieurs tours dans le quartier d’affaires de Bruxelles, un désastre urbanistique absolu, Aldo Vastapane, Willy De Clercq… Il avait aussi su s’attacher la bienveillance de nombreux organes de presse, aussi bien nationaux que confidentiels.

En 1983, la police a mené une perquisition chez Libert et un de ses congénères, et a trouvé une quantité d’armes, des laissez-passer pour le QG de l’armée à Evere et des documents secrets de l’OTAN, dont on dira plus tard qu’ils ont été volés pour démontrer des failles de sécurité de l’OTAN, théorie un peu tirée par les cheveux.

Le commissaire de la Sûreté belge Christian Smets aurait même formé les cadres de WNP et possédait une carte d’affilié. Il dira qu’en fait, il avait infiltré le groupe et dans ce cadre avait du effectuer des « missions de reconnaissance », mais pas plus. WNP aurait cessé d’agir après le « suicide » de Latinus le 24 avril 1984, et Libert aurait alors rejoint un autre groupe d’extrême-droite, Les Compagnons du Christ Graal[31].

Même scénario en 1984 : des obus d’avions ont été volés sur la base militaire de Florennes, par un type infiltré chez des militants pacifistes hollandais, et retrouvés grâce aux indications d’un des membres de l’association. Le reste a trouvé par des militants pacifistes hollandais sur un camp proche de la base de Woensdrecht au Pays-Bas et à 2 km de la frontière belge[32].

Le militant infiltré, Wood, opérait à la demande des services de renseignement hollandais le BVD. Il a aussi « expliqué qu’il est entré en contact sur l’ordre du colonel américain Stevenson en poste à Francfort, avec un certain Blackburn de l’ambassade américaine à La Haye, lequel est, à son tour, entré en contact avec le BVD », relate le sénat belge dans son rapport sur le Gladio, « Wood a précisé, en outre, que sa mission ne consistait pas seulement à identifier les militants pacifistes et à découvrir quelles actions ils projetaient, mais aussi à déterminer par tous les moyens qui, parmi eux, était disposé à mener des actions violences, ce qui l’obligeait à encourager de telles actions« .

Les Tueries du Brabant, un mystère de près de 40 ans?

Les tueries du Brabant, qui restent l’événement majeur des « Années de plomb » en Belgique, sont quant à elles restées totalement impunies. Un jeu de Cluedo trgique qui dure depuis près de 40 ans, sans que la justice n’ait abouti à une vérité judiciaire.

Il faut dire que beaucoup d’ « erreurs » du type destruction de pièces à convictions, sauciçonnage du dossier jusqu’en 1987, oublis d’actes de procédures, expertises à l’emporte-pièce ou fuites organisées ont émaillé cette affaire.

Il s’agit de 17 attentats commis en deux vagues entre 1982 et 1985, dans des armureries, des épiceries, une bijouterie, deux restaurants et dans une dizaine de supermarchés, entraînant 28 morts presque tous des civils. A chaque fois, le butin des tireurs encagoulés et très professionnels dans les massacres était dérisoire, parfois il ne s’agissait même que de denrées alimentaires. Les pouvoirs publics, quant à eux, promettaient davantage de sécurité.

Ces attaques menées en deux grosses vagues ont eu lieu dans la région de Bruxelles (le Brabant), ainsi qu’à Maubeuge pour la 1ère et en Flandre pour la dernière attaque en novembre 1985. Toutes sont restées impunies, les enquêtes ont été sabotées, et on c’est seulement depuis quelques années que l’on commence à avoir officiellement des morceaux de vérité mélangés à beaucoup de dénégations et de contre-feux.

Par exemple, en mars 2018, un témoin a expliqué qu’une famille a été prévenue de ne pas se rendre au supermarché d’Alost le 9 novembre 1985, le jour où était organisé l’attentat. Celui qui a prévenu cette famille n’était autre qu’un responsable de la sûreté de l’Etat. Début 2019, deux anciens flics ou gendarmes qui avaient travaillé sur l’affaire ont été arrêtés et perquisitionnés dans le cadre de nouvelles recherches.

Lors du premier attentat de la seconde vague, le 27 septembre 1985 au supermarché Delhaize de Braine-l’Alleud, l’une de les victimes, un adolescent qui a pris une rafale de balles sur le parking a été marqué par le regard d’un des tueurs, qu’il dit avoir reconnu chez l’un des policiers lors d’une audition au sujet de l’attaque[33].

Quelques minutes après cette attaque qui a fait trois morts, l’équipe s’est dirigée vers un autre centre commercial Delhaize à Overijse où ils ont canardé dans la rue à coups de fusils à pompe, tuant trois civils, puis deux autres dans le magasin. Montant total des deux butins : 25.000€.

« Le scénario est toujours à peu près le même. Un groupe de cinq à huit hommes, calmes, organisés, puissamment armés (pistolet-mitrailleur et fusil à pompe), et « muets », tue sans raison apparente les gens qui croisent leur passage. Les hommes tirent en « marche d’assaut », c’est-à-dire en avançant sur l’adversaire, une technique enseignée dans les unités d’élite et lors de certains stages de gardes du corps. Chacun semble avoir un rôle précis, celui de tuer, n’hésitant pas à abattre les clients à couvert derrière les rayons ou réfugiés derrière leur véhicule sur le parking. Il arrive aux braqueurs d’enchaîner deux attaques en trente minutes à 20 km de distance », explique Gérard Desmaretz dans son livre « Stay-Behind. Les réseaux secrets de la Guerre-froide ».

Dès septembre 1985, des familles de victimes ont dénoncé la chape de plomb qui régnait sur l’enquête, et soupçonnaient des entraves à l’enquête. En revanche, des pièces à conviction ont été régulièrement disséminées dans le pays, pour être retrouvées plus ou moins rapidement. Une cellule d’enquête a été créée, la cellule Delta, dont plusieurs éléments ont eu des relations et comportements douteux au cours de l’enquête. Un de ses anciens enquêteurs, Roger Romelart, retraité de 78 ans, s’est suicidé en 2019 après que les manipulations de l’enquête aient été diffusées publiquement.

Mais les autorités ont continué à saboter l’enquête pour éloigner les soupçons de l’Etat. Même un magistrat chargé de l’enquête a dénoncé ce sabotage. Il a écrit aux chefs de partis politiques pour dire qu’on l’a empêché de mener des actes d’instruction qui auraient pu faire le lien entre les attentats et des membres d’extrême droite de la police, notamment Mahdani Bouhouche, dont on va reparler.

De fait, un certain nombre de flics et gendarmes, tous liés à l’extrême-droite, sont cités comme gravitant dans les milieux suspectés d’être derrière l’affaire des tueries du Brabant.

Le quotidien La Libre Belgique rappelait le 26 octobre 2017 : « Une participation de gendarmes dans les « Tueries » est une hypothèse examinée de longue date. Fin 1983 déjà, après la première vague des tueries du Brabant, c’est-à-dire bien avant les attaques les plus meurtrières de 1985, l’ex-gendarme Martial Lekeu s’était rendu à la police judiciaire. Il avait raconté que des gendarmes et des militaires étaient impliqués dans les attaques. Deux semaines plus tard, après avoir reçu des menaces de mort, il fuyait aux Etats-Unis. »

Lekeu avait aussi évoqué le « groupe G », composé de gendarmes néo-nazis membres comme lui du Front de la Jeunesse. Le journaliste ajoute que « C’est aussi à ce moment qu’étaient apparus les noms des ex-gendarmes Madani Bouhouche et Robert Beijer« .

Il y a aussi un français, qui dit avoir appartenu au SAC[34] et qui a avoué plus d’une trentaine de fois entre 1983 et 1986 avoir été l’un des membres de l’équipe qui a attaqué le Colruyt de Nivelles le 17 septembre 1983, le dénommé Adriano Vittorio. Des aveux extorqués a-t-il dit. Pourtant, il a été bien protégé par les autorités françaises qui lui ont évité d’être questionné de manière trop serrée par les enquêteurs belges, et il était connu dans la région de Mons pour avoir commis quelques braquages.

Un autre français proche du SAC et des renseignements français a aussi tourné dans l’entourage proche de protagonistes soupçonnés d’être impliqués dans les tueries, mais n’a jamais été inquiété par la justice.

Le SAC était aussi actif en Belgique, surtout après la dissolution de l’organisation en 1981. Le plat pays « servait de plaque tournante pour exporter de l’héroïne vers la Suède et la Suisse via un homme de confiance, le trafiquant de stupéfiants André Condemine[35] qui utilisait comme paravent une société médicale. Après la tuerie d’Auriol en 1982 qui amena la dissolution du SAC, plusieurs des responsables du mouvement viendront se réfugier en Belgique » comme le rappellent les auteurs du livre « Les tueurs fous du Brabant ».

Il a été question d’une « filière boraine » autour de la bande de Vittorio, piste suivie par la justice belge mais peu solide bien que des connexions entre cette bande et les tueries existent. Un procès a eu lieu en 1988 mais les condamnations correspondaient à des faits différents des 17 attaques du Brabant. Par contre, la piste de l’extrême droite a été clairement négligée, de même que celle de l’Opus Dei[36], très puissant en Belgique et dans les milieux de la droite catholique.

L’enquête parlementaire sur le Gladio n’a évidemment pas permis de découvrir la vérité sur les tueries du Brabant. Bien que de nombreux regards, après la révélation du Gladio en 1990, se soient tournés vers les milices stay-behind, les chefs du renseignement belge ont toujours refusé de collaborer et n’ont jamais donné les noms des agents impliqués. Le gouvernement a officiellement mis fin au stay-behind local fin 1990.

Des liens clairs ont cependant pu être établis entre l’organisation Westland New Post (WNP) créée en 1979, et les tueries du Brabant. WNP était essentiellement composée de gendarmes, et était dirigée par Paul Latinus. Latinus travaillait également, et était rémunéré depuis 1967 par la Defense Intelligence Agency US, la DIA, les services secrets du Pentagone, et a ensuite été formé par l’OTAN[37] dont il a obtenu un agrément de sécurité.

Devant un juge d’instruction, Latinus a déclaré avoir été recruté à 17 ans « par une organisation étrangère dans le but est de lutter par tous les moyens contre le communisme soviétique« , avoir été « initié en 1973 au de contre-espionnage et aux techniques de renseignement par un officier de l’OTAN à Tongres« , une base militaire, alors qu’il faisait son service militaire, et puis avoir été missionné en 1977 par ce service étranger pour s’introduire « dans la sphère du Front de la jeunesse » : « Ma nouvelle mission en 1980 fut alors de créer en Belgique un groupe revanchard nazi calqué sur la Waffen-SS « [38].

Il a aussi été officier de réserve de l’armée de l’air, informateur de la Sûreté de l’Etat à partir de 1978, a fréquenté un groupe de paras anti-communistes[39] proche du PSC, et mené une carrière « politique », comme conseiller au ministère de l’Emploi et du Travail, ou encore au cabinet d’une secrétaire d’Etat du parti chrétien[40].

Latinus a aussi collaboré avec le PIO, le « Public Information Office » [41], une cellule de guerre psychologique de l’armée qui était proche de partis politiques (le parti libéral et le parti chrétien), et se vantait d’avoir milité à la « World Union of National Socialists » (l’Union mondiale des nazis, créée en 1962) ainsi qu’au Front de la Jeunesse où il serait donc entré sur demande en 1978.

Au début des années 80, Latinus a déclaré que son organisation WNP « travaillait pour une puissance étrangère alliée et contre l’infiltration soviétique en Belgique » [42].

En avril 1984, l’année où la première vague des tueries du Brabant a pris fin, Paul Latinus a été retrouvé suicidé[43]. Latinus avait déclaré avoir en sa possession un sulfureux dossier de pédocriminalité dans les hautes sphères du pouvoir belge, le dossier Pinon, qui a été étouffé comme il se doit. Par ailleurs, il était ami avec Georges Marnette, un flic qui a dirigé… le Groupe de Répression du Banditisme (GRB), et était aux premières loges dans l’enquête –également sabotée- sur le réseau pédophile belge, réseau qui a bien failli être mis au jour suite à l’affaire Dutroux.

Marnette a très vite voulu rejoindre l’enquête sur l’affaire Dutroux, bien qu’il ait été un assidu du club à partouzes où trainait le complice de Dutroux, Michel Nihoul, qui s’appelait Les Atrébates.

C’est peu de temps après avoir prévenu son ami Marnette qu’il avait des révélations à lui faire sur les auteurs des tueries du brabant que Latinus a été retrouvé suicidé avec un câble de téléphone ne pouvant en principe supporter que 42 kilos. Quand il est mort, la justice a cessé de travailler sur la piste Westland New Post bien qu’il ait été établi que les membres du groupe d’extrême droite créé par Latinus ont accompli des missions de surveillance de supermarchés, notant des éléments tels que les horaires, la distance du poste de police[44].

D’autres liens ont été mis en évidence entre les tueries du Brabant et le groupe d’extrême droite le Front de la Jeunesse, qui aurait créé un groupe secret de gendarmes d’extrême-droite appelé le groupe G., soupçonné d’être impliqué dans les tueries du Brabant.

Selon le policier Martial Lekeu, ce groupe aurait été créé au milieu des années 70 par le Front de la Jeunesse pour « lutter contre le péril rouge » et les « hordes venues de l’est », ou encore défendre la « tradition » et des « valeurs ».

Lekeu, lui-même d’extrême droite, aurait trouvé chez le Front de la jeunesse des plans d’attaques armées de supermarchés, ce qui a abouti à l’éjection de certains membres du groupe G. de la gendarmerie. Mais Martial Lekeu lui aussi était soupçonné d’être impliqué dans une des attaques à Tamise et dans une affaire de trafic d’armes à Nivelles avec un autre flic (le dénommé Madani Bouhouche). Il était aussi soupçonné d’être un des chefs de la bande des tueurs.

Deux juges voulaient l’entendre mais en août 1984 il est parti aux Etats-Unis après avoir touché une grosse somme d’argent, et a travaillé pour la DEA (les stups). Il s’y est senti suffisamment protégé pour faire des révélations à la presse au sujet des attaques, en désignant le Front de la jeunesse comme leur organisateur.

Il a par exemple déclaré en 1989 dans une interview au journal Parnorama : « Il est clair que Francis Dossogne, le leader du Front de la Jeunesse [candidat FN dans la Meuse en 2015 [45]], se cache derrière tout ça. Des officiers de gendarmerie et de l’armée sont également impliqués. Et en premier lieu le baron de Bonvoisin et le CEPIC.

– Avez-vous des preuves ?

– Je ne lâche pas mes atouts. Je dirai seulement que de Bonvoisin est un homme important dans les milieux d’extrême-droite en Europe. Il a beaucoup de contacts, dans l’entourage de ceux qui enquêtent sur les tueurs, dans l’état-major de la gendarmerie, dans l’extrême-droite et dans le monde des banquiers européens » [46].

 

On s’aperçoit que plusieurs acteurs du milieu des barbouzes d’extrême-droite belges se sont enfuis aux Etats-Unis. Outre Lekeu, un policier dénommé Christian, alias Francis Pattijn, accusé par un de ses anciens collègues d’être l’un des tueurs, est allé vivre aux USA où il est devenu membre de l’Eglise de Scientologie[47], un des nombreux bras armés de l’ingérence « religieuse » US dans le monde.

Apparemment il a même travaillé au saint des saints, le siège de Clearwater. Et l’ « Eglise » de Scientologie a un statut de religion officielle en Belgique, où se trouve la capitale de l’Europe.

Un autre épisode pittoresque était l’accusation du ministre de la Justice Jean Gol comme étant le cerveau des tueries, par un directeur de prison partouzeur dénommé Jean Bultot. Ledit Bultot a fui au Paraguay (terre d’accueil de nombreux fachos Belges et Français) juste après l’assassinat d’un ingénieur travaillant dans la firme d’armement nationale la FN Herstal et était soupçonné de graviter autour de l’affaire[48], le dénommé Juan Mendez avec lequel il était en relation[49]. Et surtout, il était accusé par un indic des renseignements d’avoir fourni une mitraillette qui a servi le lendemain lors de l’attaque d’Alost.

Tout cela montre au moins une chose : l’embrouillage total de l’affaire par moult protagonistes, et cela dès le départ. Et il y a très probablement des affaires dans l’affaire.

Selon plusieurs observateurs qui ont travaillé sur les tueries du Brabant ou ont été liés à cette affaire, ces massacres ont également servi à couvrir le réseau pédophile. De fait, plusieurs des victimes gravitaient dans le réseau ou autour.

Les partouzes auxquelles se rendent ces politiciens, de droite essentiellement au début, puis des « socialistes », sont d’abord un moyen de corrompre. En effet, ceux qui fournissent les mineurs filment les soirées en caméras cachées et détiennent ainsi des éléments pour faire pression sur ces pervers, qui tiennent les rênes du pays. On a l’exemple de Jeffrey Epstein, assez récent, aux USA, qui montre que la tradition ne se perd pas.

Baudouin Dernicourt est un officier de gendarmerie qui a travaillé sur l’affaire Dutroux pour l’étouffer, et était en lien avec le réseau Gladio. Il a été mêlé en 1984 à une affaire d’explosifs volés dans une carrière et utilisés ensuite par les CCC, les Cellules Communistes Combattantes[50]. Par ailleurs, certains disaient qu’il était membre du Westland New Post.

C’est Dernicourt qui a dirigé la « relecture » des témoignages des témoins « X », qui évoquaient le réseau pédophile, donnaient des noms, des lieux, des dates. Cette relecture des plus tendancieuses, qui était en fait une réinterprétation des témoignages afin de les décrédibiliser, a permis d’étouffer l’affaire. Il a aussi pris la suite des auditions de l’un de ces témoins, qui a très vite cessé de collaborer tant Dernicourt et son collègue se sont montrés agressifs et peu intéressés par les éléments pourtant concrets qu’elle donnait[51]. Dernicourt a aussi agressé un autre témoin important qui dénonçait le réseau, et qui a refusé de continuer à parler.

Dernicourt, qui passait pour un « superflic », a ensuite enquêté sur un volet financier de l’affaire Dutroux, et avait conclu contre toute évidence que « Aucune des constatations effectuées jusqu’à présent ne nous permet de démontrer que Dutroux aurait retiré des avantages financiers d’un trafic d’enfants. Si c’était le cas, ces éventuels flux d’argent ne semblent pas se situer en Belgique. Dutroux possède des comptes en Slovaquie et au Luxembourg, mais nous n’avons pas d’informations à ce sujet« , selon le livre « Les dossiers X, ce que la Belgique ne devrait pas savoir« . On reviendra sur ce dossier prochainement.

 

En 1991, un truand incarcéré et déjà soupçonné d’avoir participé à certaines attaques du Brabant, Philippe De Staercke, a écrit à la presse pour s’accuser d’avoir participé à trois des tueries. Ce braqueur condamné à 20 ans de prison en même temps que Jean Bultot et d’autres types en 1987 a expliqué avoir participé aux massacres pour des « raisons idéologiques ».

« Il aurait commis ces crimes avec un militaire et un gendarme sur ordre direct d’un ancien de la sûreté de l’État, d’un commandant de la gendarmerie et d’un colonel de l’armée belge. Il précise avoir été choisi sur base de son dossier. À demi-mot, De Staercke désigne le CEPIC, Centre Politique des Indépendants et Cadres Chrétiens comme étant la tête pensante des tueries du Brabant » écrivent Michel Leurquin et Patricia Finné dans « Les tueurs fous du Brabant ».

De Staercke, qui a eu la bonne idée de se rétracter, a bénéficié d’un non-lieu en 2001 pour cette affaire.

D’ailleurs, le policier retraité qui s’est suicidé en 2019, Roger Romelart, avait justement travaillé sur l’implication du braqueur De Staercke et sa bande dans les tueries. Il était décidé à faire avancer les choses et avait communiqué des informations à la justice qui n’en a rien fait. Puis il se serait suicidé.

En Belgique, une proxénète de luxe, Lydia Montaricourt, trafiquait aussi des mineurs auprès de l’ « élite » belge et filmait les actes. Son réseau actif à la fin des années 70 et début 80 s’étendait jusqu’en Allemagne et au Pays-Bas, et était semble-t-il une filiale du réseau français de « Madame Claude » pour laquelle Montaricourt avait travaillé directement après son passage par le Lido. Le réseau de Montaricourt, qui a repris celui d’une autre maquerelle appelée Fortunato Israël, avait beaucoup de clients dans la politique et le business, et aussi beaucoup de clients du Moyen-Orient.

La liste de ses clients a opportunément disparu. Mais Paul Vanden Boyenants alias VDB était l’un des clients de ce réseau, comme l’a expliqué Fernand Beaurir, dirigeant de la police, membre du CEPIC et proche de VDB, lors d’une audition. Beaurir avait dirigé la section anti drogues de la police, le Bureau National des Stupéfiants à partir de 1978. Un organisme qui a bénéficié d’argent et d’entraînement de la part de la CIA. Accessoirement, Beaurir fréquentait l’auberge des 3 Canards, site d’une fusillade des tueries du Brabant.

On retrouve aussi le réseau Montaricourt dans l’affaire dite « Pinon »[52], au sujet de partouzes impliquant du gratin politique, de la sécurité ainsi que des notables de tendance politique très à droite, auxquelles des prostituées et des mineurs étaient présente, dans les années 70 et début 80. Les enfants étaient pris dans un foyer pour enfants défavorisés par le juge de la jeunesse qui était chargé du suivi et du placement des enfants dans le cadre du divorce du couple Pinon. Le journal de gauche Pour, qui enquêtait sur cette affaire ainsi que sur Bonvoisin et le CEPIC, a été incendié à l’époque du scandale, en juillet 1981.

Une prostituée du réseau de Montaricourt, Maud Sarr, a déclaré en 1990 que VDB, ainsi que le procureur du Roi Henri Jaspar, le procureur de Nivelles Jean Deprêtre (accusé par des témoins du dossier Dutroux d’avoir participé à des partouzes pédophiles), et le commandant de gendarmerie Léon François ont participé à ces soirées de partouzes et de cocaïne, où des mineurs de 13-14 ans étaient victimes de viols.

VDB, boucher à l’origine, fortement attaché au retour d’un roi compromis durant la guerre (Léopold III), est devenu député du PSC dès 1949, puis 1er ministre (1966-1968) ce qui lui a permis de favoriser l’avancée dans l’OTAN, après quoi il a longtemps été ministre de la Défense (1972-1979). Il a très souvent été cité dans des affaires de magouilles financières belges (comme l’affaire PDG, dont l’argent a servi à financer un organe du stay-behind, le PIO[53]) voire de trafic de drogue.

En 1986 il a été poursuivi et condamné pour évasion fiscale et trafics, avant d’être plus ou moins enlevé en 1989 par la bande du braqueur Patrick Haemers qui s’était fait passer pour un groupe d’extrême gauche, et qui l‘a libéré contre une rançon de l’équivalent de 4,8 millions de Francs français, à peine un mois plus tard.

Par ailleurs, il a toujours fricoté avec l’extrême droite, ayant affiché une certaine proximité avec des nazis comme Léon Degrelle, et soutenant divers mouvements d’extrême droite, quand il ne les créait pas, comme ce fut le cas du CEPIC. Il a par exemple été membre d’une sorte de lobby, le Cercle des Nations, créé par un aristocrate belge en 1969. Au comité d’honneur, entre un prince, un comte, un baron et de très riches patrons d’entreprises, figurait Vanden Boeynants. Ce club très sélect était aussi très à droite.

Un major de la gendarmerie (la BSR, la brigade de surveillance et de recherche), le major De Cock, a rédigé en 1973 une note adressée à ses supérieurs, dans laquelle il mentionnait des « contacts entre certains milieux financiers et des groupements politiques d’extrême droite« , dans le but de « noyauter nos institutions par des éléments favorables à la doctrine de l’extrême droite ». Il faisait d’ailleurs référence, entre autres, aux « NEM-clubs » du magazine de Bonvoisin, anticommuniste et pro américains[54]. Il est assez intéressant de regarder le cercle de relations de Vanden Boyenants, et on va être amenés à en reparler.

Il faut aussi mentionner que lors de la révélation du stay-behind en 1990, le ministre belge de la Défense, Guy Coeme, s’est cru obligé de préciser que l’antenne belge n’avait rien à voir avec les affaires Westland New Post, Cellules Communistes Combattantes, ni même avec les tueries du Brabant, comme beaucoup d’observateurs le soupçonnaient. Comme on n’a jamais obtenu la liste des membres belges, il n’a pas été possible de recouper avec les listes des suspects de ces différentes manipulations.

Enfin, la piste de l’implication de Patrick Haemers, habitué des braquages et proche de l’extrême-droite, a été étudiée par certains. Il a été retrouvé suicidé dans sa cellule en Belgique en mai 1993 mais selon son avocat il a été tué pour ne pas donner le nom de l’homme d’affaires qui aurait été le commanditaire de l’enlèvement de Van den Boeynants, et sur les tueries du Brabant.

Haemers, qui correspondait à la description d’un des tueurs et a été identifié par deux témoins de l’attaque d’Alost, fréquentait l’auberge des Trois Canards. Par ailleurs, de manière prémonitoire il a expliqué à une adolescente victime du réseau pédocriminel qu’il fréquentait à la fin des années 70 qu’elle devait quitter la Belgique car des événements terribles allaient s’y produire.

Ce fil d’un riche commerçant bruxellois fréquentait aussi bien le gratin bruxellois que le milieu du banditisme, les deux étant très poreux en Belgique. Il a commis son premier braquage en 1981, pour lequel il a été condamné, ce qui ne l’a pas empêché de continuer en braquant des fourgons de transferts de fonds avec des armes de guerre.

Haemers a déclaré à son père qu’il avait participé aux tueries du Brabant avec sa bande et que l’opération avait été commanditée par les avocats Vander Elst et Dumont, proches à la fois du milieu des politiques les plus à droite du pays, liés à VDB, et par les ministres Jean Gol, Willy De Clerck et André Cools.

Pour conclure sur l’installation du stay-behind en Belgique, une exposition à l’occasion des 100 ans des renseignements de l’armée belge, en 2015, a été l’occasion pour les militaires de faire un demi aveu sur l’existence d’un réseau stay-behind en Belgique, mais cela pour mieux nier tout lien avec l’OTAN [56] alors que les noms des agents du Gladio belge se trouvaient entre les mains des renseignements US et anglais,  dans des coffres blindés à Washington et à Londres.

La version officielle de l’armée belge, en 2015, est donc peu ou prou la suivante : « En Belgique, c’est une branche du renseignement militaire, le Service de Documentation et de Renseignement et d’Action (SDRA VIII) qui est chargé de mettre en place ce réseau. Ses membres s’exercent à la natation de combat, aux parachutages nocturnes et au largage de matériel derrière les lignes ennemies. Le réseau comprenait des militaires et des civils, bien placés, qui restaient dans le plus grand anonymat« . Ils s’entrainaient en secret, mais pour ne rien faire, et l’OTAN n’a rien à voir avec la CIA.

Notes:

[1] Cf. Rik Coolsaet dans l’article « La Belgique dans l’OTAN (1949-2000) ».

[2] Toutefois les US prenaient les infos contenues dans ses rapports avec recul, car Moyen, grand amateur de renseignement, était connu pour extrapoler. Moyen transmettait aussi des informations aux services hollandais, suisses, anglais et français.

[3] Cf. « Les réseaux stay behind en France 1945-1962 ».


[4] Cf. « Qui a tué Lahaut? Les dessous de la Guerre froide en Belgique » de Emmanuel Gerard, Françoise Muller et Widukind De Ridder.

[5]  » L’interprétation classique, selon laquelle le Pacte de l’Atlantique Nord était la conséquence des craintes que suscitaient les intentions militaires de l’Union soviétique, n’est pas conforme à la réalité. Bien au contraire : chacun des États membres du Traité de l’Atlantique Nord avait ses raisons bien à lui d’y souscrire, et elles étaient souvent en premier lieu de nature économique ou liées à sa politique intérieure. Ce qui, par ailleurs, unissait tous les pays concernés sous la bannière américaine était l’instabilité sociale qui aurait découlé de la récession économique persistante, dont la seule issue semblait être de collaborer étroitement avec les États-Unis », explique Rik Coolsaet dans l’article « La Belgique dans l’OTAN (1949-2000) ».

[6] Cf. Enquête parlementaire sur l’existence en Belgique d’un réseau de renseignements clandestin international, rapport rendu le 1er octobre 1991.

[7] Le sabotage économique a été confié à la charge du ministre de la Défense en 1954.

[8] Les initiales SDRA viennent de « Service de Documentation, de Renseignement et d’Action ».

[9] Mais ces listes auraient été cryptées après 1984 et en temps de guerre ni les US ni les anglais n’auraient pu les déchiffrer, selon un ancien responsable des renseignements militaires.

[10] D’autant que la légitimité de la royauté avait été attaquée par les dérives coloniales et diverses magouilles financières.

[11] Cf. « Histoire politique des services secrets français : de la seconde guerre mondiale à nos jours » de de Jean Guisnel, Roger Faligot et Rémi Kauffer.

[12] André Moyen a travaillé pour les renseignements belges et la résistance pendant la guerre, au sein du réseau Athos qui était en lien direct avec l’OSS, l’ex CIA. En 1944 il a rejoint l’OSS et le SDRA, les renseignements militaires belges.

[13] Ce réseau anticommuniste s’appelait le Bloc Anticommuniste Belge (BACB), un groupe paramilitaire composé de nombreux flics, et soutenu par l’OTAN.

[14] En échange de ces financements, les entreprises belges recevaient des fichiers sur les communistes travaillant dans leurs entreprises, et bénéficiaient d’aide en cas de grève.

[15] Moyen a créé la branche belge de Securitas et en a pris la direction (société de sécurité suédoise devenue G4S) en 1962 pour la Belgique et le Maroc, incarnant parfaitement le mélange des genres à l’anglo saxonne entre sécurité publique et sécurité privée. On notera que G4S a obtenu le contrat de surveillance du QG de l’OTAN à Bruxelles.

[16] La « Fraternité Mondiale » (world brotherhood) est un mouvement transnational chrétien et juif, pro européen et atlantiste. Le groupe était soutenu par Allen Dulles, par William Donovan de l’OSS, Paul G Hoffman qui a piloté le plan Marshall et président de la Fondation Ford en 1950, John McCloy qui a dirigé la fondation Ford et a participé à la rédaction des premiers traités instituant l’Europe. Il y avait beaucoup d’anglais et d’US parmi les membres. Financée par des banquiers, des entreprises et des dons de particuliers, ses 5 principaux axes de travail étaient :

La formation des enseignants et des jeunes, en modifiant les manuels scolaires et les programmes.
La religion pour renforcer la coopération chrétiens – juifs.
Associatif pour renforcer la collaboration entre associations de jeunesses, féminines, culturelles…
Travail et industrie pour désamorcer les conflits
Médias pour aligner les vues dans les médias.
Parmi ses soutiens, il y avait François Lehideux, membre de la synarchie lié à la banque Worms et ancien ministre vichyste, Léon Jouhaux traitre de la CGT et créateur de FO grâce à l’argent des US, , Henri Luce le richissime patron du Time, Eleanor Rossevelt, William Donovan, le Belge Pierre Bonvoisin, proche de l’extrême droite et des milieux patronaux, accessoirement président de la Société Générale en Belgique, le patron de la Deutsche Bank, ex banquier du 3e Reich Herman Abs… En France il y avait dans la section parisienne l’incontournable Raymond Aron, toujours servile avec les intérêts US, Georges Duhamel (ministre et père d’Olivier Duhamel), Pierre de Bénouville, quelques banquiers…

[17] Cf. « Gladio » de Jan Willems.

[18] Cf. « Gladio » de Jan Willems.

[19] La Légion nationale a été créée en 1921, et Hoornaert y a rapidement pris les commandes. L’idéologie de base était fasciste et monarchiste. Là aussi les banques et l’industrie belges étaient les financiers, car la Légion remettait de l’ordre dans les usines en cas de grève, à la demande des patrons.

[20] Cf. « Stay-Behind », André Lemaître, p. 45.

[21] A partir de 1979, le major Bougerol transforme le PIO en une structure parallèle financée principalement par Bonvoisin. Le siège du PIO est transféré au 39 rue Belliard à Bruxelles, dans les locaux de la société PDG, dont le dirigeant Bonvoisin a été poursuivi pour fraude fiscale.

[22] Boucher de formation, Vanden Boyenants a commencé sa vie publique comme représentant syndical, devant à 26 en vice-président de la Corporation des Bouchers-Charcutiers de Bruxelles. En 1948 il a été présenté au directeur du quotidien catholique de droite La Libre Belgique, Paul Jourdain, militant d’une Europe fédérale, qui l’aurait poussé en politique dans le parti chrétien, le PSC. En 1952 il est devenu conseiller communal à Bruxelles, puis échevin (adjoint au maire), notamment aux travaux publics, puis député, puis ministre en 1958, et s’est aussi occupé de l’organisation de l’Exposition Universelle de 1958. Très populaire depuis le milieu des années 50 en faisant campagne sur sa personnalité plutôt que sur un programme, « VDB » a accueilli l’OTAN les bras ouverts en 1966. Sa carrière a décliné au tournant des années 80 suite à divers affaires judiciaires qui se sont accumulées après sa fin politique (corruption, fraude fiscale, achat de votes…).

[23] Spécialiste de la subversion, Bougerol a beaucoup voyagé pour assumer ses nombreuses missions, qui ne se limitaient pas au PIO. Il a été à Taiwan où il y a une école de guerre psychologique en 1976, au Liban en 1978, en Espagne, en Irlande, au Portugal, en Italie, aux Pays-Bas, en France, en Allemagne sur la base de l’OTAN de Heidelberg (ex base de l’US Air Force).

[24] En 1980 Marie-Thérèse Legon a trouvé un nouveau job à l’European Institute of Management (EIM)– Benelux, un lobby patronal devenu plus militaire avec son arrivée. En 1981, l’ex ambassadeur US à Bruxelles, Douglas MacArthur IIK, a même rejoint le conseil d‘administration.

[25] Cette mainmise de Van den Boyenants sur le PIO a posé problème, les renseignements soupçonnant un « noyautage » du réseau de Bougerol. Du coup, il aurait été dissous en 1979 mais Bougerol a continué ses activités de renseignement et de propagande dans les milieux d’extrême-droite cependant comme le dit pudiquement le rapport du sénat, « Il subsiste un mystère sur les sources de financement qui aidèrent Bougerol à partir de 1979 ». En fait, le PIO a été simplement privatisé, tout en étant couvert par Vanden Boyenants.

[26] Cf. Le Soir du 15 novembre 1990.

[27] Cf. « Gladio » de Jan Willems.

[28] Notamment René Belin, ex syndicaliste de la CGT devenu ministre du Travail sous Vichy, Achille Dauphine-Meunier (proche de Belin, autre ex syndicaliste devenu vichyste qui a échappé à l’épuration), Jean de Fabrègues (vichyste aussi), puis plus tard des gaullistes.

[29] Cf. « Les tueurs fous du Brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[30] Ce qui lui a valu d’être emprisonné en octobre 1944, jusqu’à sa libération en février 1946.

[31] Libert serait parti avec un ami de WNP, gendarme à l’époque, Lucien Marbaix, qui a eu droit en 1994 à une perquisition chez lui suite à des infos données par un commissaire dont on va reparler, Georges Marnette. Des breloques et de la littérature nazies, des munitions et des armes de gros calibre ont été trouvées chez Marbaix, qui disait avoir rejoint le Vlaams Blok, parti flamand d’extrême droite. Marbaix était dans les années 80 membre d’un certain « Groupe G », avec des gendarmes d’extrême droite, qui était lié à l’affaire du WNP.

[32] Cf. rapport du Sénat belge de 1991, p.91.

[33] Cf. « Les tueurs fous du Brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[34] Vittoriao a notamment participé à des campagnes électorales de Joseph Comiti, député gaulliste des Bouches-du-Rhône qui a été aussi conseiller ministériel dans les années 70.

[35] Condemine a été retrouvé mort en 1973, dans une malle échouée en bord de Seine, alors qu’il était officiellement recherché par les polices française et US. Il avait fui au Paraguay comme Joseph Ricord à l’époque où beaucoup de membres du SAC impliqués dans les trafics de drogue et d’armes notamment ont pu continuer leurs activités en Amérique latine.

[36] Un indicateur avait pointé l’Opus Dei, qui aurait cherché à déstabiliser l’Etat. Les gendarmes qui avaient enquêté sur cette piste ont soudain été mal notés et écartés.

[37] Ingénieur en sciences nucléaires, Latinus était aussi un informateur de la Sûreté d’Etat. Latinus avait fait son service militaire sur une base de l’OTAN, était aussi officier de réserve de l’armée de l’air belge et membre du BROC, un club d’officiers d’extrême droite du Brabant. Quand ses activités ont été dévoilées en 1981, Latinus a pris la fuite vers le Chili de Pinochet avant de revenir pour reprendre en main le WNP.

[38] Cf. « Stay-behind. Les réseaux secrets de la Guerre-Froide » de Gérard Desmaretz.

[39] Le BROC pour Brabant Reserve Officer Corp, créé en 1975, dont étaient membres des militaires d’extrême-droite, et qui naviguait dans la mouvance du PSC, le parti Social Chrétien de Vanden Boeynants.

[40] A ces postes, il a pu infiltrer des organisations de jeunes, pour ficher les affiliés.

[41] Le PIO était dirigé par le major JM Bougerol, et était composé d’une branche militaire et d’une branche civile. Bougerol a été formé à l’OTAN notamment, et a effectué des voyages pour se former, comme à l’école de guerre psychologique de Taïwan en 1976. Mais, Bougerol voyageait beaucoup en Europe et ailleurs. Il publiait des articles de propagande dans le quotidien La Dernière Heure sous le pseudonyme de « Miller ».

[42] Selon le quotidien Le Soir, cité dans le rapport d‘enquête parlementaire sur les réseaux Gladio. Finalement, le PIO aurait été dissous, du moins sa branche militaire, en 1978, mais ses activités de subversion ont continué, toujours sous le pilotage de l’armée.

[43] A ce moment, plusieurs membres de l’extrême droite liés au stay-behind ont été assassinés, comme José Vanden Eynden, Constantin Angelou retrouvé dans le coffre de son taxi en 1982, Juan Mendez, qui en savaient probablement un peu trop sur la « terreur » belge à l’époque, notamment les tueries du Brabant (selon le quotidien Le Soir du 4/10/2008, « il craignait que les armes qu’il avait vendues aient pu être utilisées lors de certaines attaques »). Sur le suicide de Paul Latinus, retrouvé pendu dans sa cave avec le fil de son téléphone et les pieds touchant le sol, de nombreuses zones d’ombre existent encore. Il se serait suicidé peu après avoir été entendu dans le cadre des Tueries du Brabant. Le dossier a été clos à la hâte en novembre 1986 à la demande du parquet général de Bruxelles, a été rouvert en 1989 sans rien donner. Beaucoup pensent qu’il a été tué parce qu’il a avoué ses liens avec les US.

[44] Cf. « Les tueurs fous du brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[45] A ce sujet le journal belge L’Avenir écrivait : « Peu de monde le connaît dans sa ville meusienne, où il réside depuis quelques années. « M. Dossogne n’a fait aucun meeting électoral, n’est venu saluer personne dimanche, lors du second tour. Il ne fait partie d’aucune association de la ville. Les gens ne le connaissent pas. Ils votent pour le FN, pas pour le nom du candidat », nous précise-t-on à la mairie de Montmédy ».

[46] Cf. « Les tueurs fous du Brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[47] CF. « Les tueurs fous du Brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[48] Au bout de 3 ans de vie au Paraguay où il a vécu dans l’opulence, Bultot a été obligé de fuir en Afrique du Sud, où il a entraîné au combat armé les recrues d’une boîte de sécurité pendant quelque temps avant d’être extradé vers la Belgique et condamné à 6 mois de prison pour des délits mineurs.

[49] Mendez était vendeur d’armes à l’international, un métier dans lequel on voit passer des montants importants ainsi que des commissions et rétrocommissions, surtout quand on vend à des pays en guerre. Mendez a rencontré dans sa jeunesse le flic d’extrême droite Madani Bouhouche, soupçonné d’être un des membres de l’équipe des tueurs. Pourtant, un expert a conclu que l’arme qui a tué Mendez était celle de Bouhouche. De plus, un témoin a déclaré en 1984 qu’un « sud-américain » travaillant pour la FN Herstal allait être liquidé car la bande du brabant wallon ne lui faisait plus confiance.

[50] Un peu plus tard, il est attrapé alors qu’il faisait du tir illégalement dans la nature, et n’est mis à pied que deux jours. Puis il obtient une promotion.

[51] Dernicourt et deux de ses collègues ont même porté plainte contre ce témoin, qui était une réelle victime du réseau, pour « calomnie et diffamation » après qu’elle se soit plainte dans un magazine du traitement que ces pandores lui ont réservé, absolument ignoble et partial il est vrai.

[52] Cf. « Les tueurs fous du Brabant » de Michel Leurquin et Patricia Finné.

[53] Le rapport de la commission d’enquête belge sur les réseaux Gladio rappelle que « le ministre de la Défense » (VDB), « aurait pris en charge certaines dépenses afférentes aux activités d’autant que le major Bougerol [chef du PIO] bénéficiait du soutien sans réserve du lieutenant général Roman, chef d’état-major des forces terrestres, le seul à être bien au courant des activités multiples du PIO. Mais dès l’origine, la SA Promotion et Distribution Générales (PDG) a été associée au financement de certaines activités du PIO, en particulier INFOREP [un centre de « documentatio »] et les conférenciers militaires ».

[54] Cette note est citée en mai 1999 dans un article de Manuel Abramowicz, paru dans le magazine « Avancées ».

[55] Selon le quotidien catholique La Libre Belgique le 6 novembre 2015,  » Stay-behind a alimenté d’innombrables théories du complot. Certains l’ont vu jouer un rôle dans les tueries du Brabant. D’autres ont cru qu’il s’agissait d’un occulte et puissant réseau proche de l’extrême droite. Beaucoup ont pensé qu’il s’agissait d’une copie conforme de l’Italien Gladio. Le réseau belge n’était pas cela. « Cette organisation n’avait rien à voir avec l’Otan, comme beaucoup de gens l’écrivent encore », nous dit le colonel honoraire Bernard Legrand, qui fut l’un des artisans du réseau et est autorisé aujourd’hui à parler. « Les Américains étaient impliqués, mais avec la CIA. Stay-behind était avant tout du renseignement. C’était un gars avec sa radio. Il devait pouvoir envoyer des renseignements sur ce qui se passait en Belgique en cas d’invasion soviétique »

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